Yaoundé –
Le système éducatif camerounais est au cœur d’un vaste débat national depuis l’annonce d’une réforme majeure visant à moderniser les programmes, améliorer la qualité de l’enseignement et mieux préparer la jeunesse aux défis économiques du XXIe siècle. Si cette réforme suscite l’espoir d’un renouveau, elle est aussi source de tensions entre le gouvernement, les enseignants, les syndicats et les parents d’élèves.
Un système éducatif en quête de modernisation
Le Cameroun, avec une population jeune de plus de 25 millions d’habitants, fait face à des défis éducatifs majeurs : infrastructures insuffisantes, pénurie d’enseignants qualifiés, disparités régionales, et un taux d’abandon scolaire élevé. La réforme vise à répondre à ces enjeux en introduisant de nouveaux curricula centrés sur les compétences, l’apprentissage des langues étrangères, et une meilleure intégration des technologies numériques.
Le ministère de l’Éducation nationale a présenté un plan ambitieux qui prévoit la refonte des programmes scolaires du primaire au secondaire, la formation continue des enseignants, ainsi que la construction de nouvelles écoles dans les zones rurales.
Des résistances syndicales et sociales
Cependant, cette réforme rencontre une forte résistance, notamment de la part des syndicats d’enseignants qui dénoncent un manque de concertation et des moyens insuffisants pour sa mise en œuvre. Plusieurs grèves et manifestations ont paralysé les établissements scolaires ces derniers mois, perturbant la rentrée scolaire.

Les syndicats réclament notamment une augmentation des salaires, la fourniture de matériel pédagogique adapté et un calendrier réaliste pour la formation des enseignants. Ils mettent aussi en garde contre le risque d’exclusion des élèves issus des milieux défavorisés si la réforme est appliquée trop rapidement.
Débats autour de l’inclusion et de la langue d’enseignement
Un autre point de tension concerne la question linguistique. Le Cameroun, pays bilingue avec le français et l’anglais comme langues officielles, doit aussi gérer la diversité des langues locales. Certains acteurs plaident pour une plus grande reconnaissance des langues maternelles dans l’enseignement, afin d’améliorer la compréhension et la réussite scolaire.
Par ailleurs, la réforme prévoit une meilleure inclusion des enfants en situation de handicap, un enjeu encore largement sous-estimé dans le pays.
Enjeux économiques et sociaux
Le gouvernement justifie la réforme par la nécessité d’adapter le système éducatif aux besoins du marché du travail, en pleine mutation avec la digitalisation et la mondialisation. L’objectif est de réduire le chômage des jeunes, qui atteint près de 35%, et de favoriser l’émergence d’une classe moyenne instruite et compétitive.
Les partenaires internationaux, dont l’UNESCO et la Banque mondiale, apportent un soutien technique et financier, soulignant l’importance d’une éducation de qualité pour le développement durable.
Perspectives et recommandations
Pour réussir, la réforme devra s’appuyer sur un dialogue inclusif entre tous les acteurs, une mobilisation accrue des ressources et une communication transparente. La formation des enseignants et l’investissement dans les infrastructures seront déterminants pour éviter un échec qui pourrait aggraver les inégalités.
Le Cameroun est à un carrefour décisif : sa jeunesse attend des réponses concrètes pour accéder à une éducation digne de ses ambitions.