Introduction
Le Tchad, pays charnière du Sahel, traverse une période de grande tension politique après le report de l’audition de Succès Masra, figure montante de l’opposition et ancien Premier ministre de transition. Ce report, intervenu dans un contexte de contestation du processus électoral et de crispations institutionnelles, soulève de nombreuses interrogations sur l’avenir de la démocratie tchadienne, la crédibilité du dialogue national et la stabilité du pays.
Succès Masra : un symbole de l’opposition tchadienne
Succès Masra, économiste de formation et leader du parti Les Transformateurs, s’est imposé ces dernières années comme l’un des principaux adversaires du régime en place. Son engagement en faveur de la démocratie, de la justice sociale et de la transparence lui a valu une popularité grandissante, notamment auprès de la jeunesse urbaine. Après avoir participé au gouvernement de transition, il a pris ses distances avec le pouvoir, dénonçant l’absence de réformes et la persistance de pratiques autoritaires.
Son audition devant les autorités judiciaires, initialement prévue pour mai 2025, devait porter sur des accusations de troubles à l’ordre public et d’incitation à la violence lors des récentes manifestations contre les résultats des élections présidentielles. Le report de cette audition, officiellement justifié par des « raisons administratives », est perçu par ses partisans comme une manœuvre dilatoire visant à affaiblir l’opposition et à gagner du temps.
Un climat politique sous haute tension
Le report de l’audition de Masra intervient dans un contexte de forte crispation politique. Les résultats contestés de la dernière présidentielle, marquée par des irrégularités et des violences, ont ravivé les tensions entre le pouvoir et l’opposition. Plusieurs leaders politiques et militants ont été arrêtés ou contraints à l’exil, tandis que la société civile dénonce la restriction des libertés fondamentales et la militarisation du débat public.
La communauté internationale, notamment l’Union africaine et la France, suit avec inquiétude l’évolution de la situation au Tchad. Les partenaires internationaux appellent au respect des droits de l’homme, à la libération des prisonniers politiques et à la reprise d’un dialogue inclusif. Le risque d’une escalade de la violence, dans un pays déjà confronté à des défis sécuritaires majeurs, est réel.
Les enjeux du dialogue national et de la transition
La gestion du cas Masra est emblématique des difficultés du Tchad à mener à bien une transition politique crédible. Après la mort du président Idriss Déby en 2021, le pays s’est engagé dans un processus de dialogue national censé aboutir à des réformes institutionnelles et à des élections libres. Mais ce processus, miné par les divisions internes et le manque de confiance entre les acteurs, peine à produire des résultats tangibles.

Le report de l’audition de Masra risque d’aggraver la défiance à l’égard du pouvoir et de compromettre la réussite de la transition. Pour de nombreux observateurs, seule une ouverture réelle du dialogue, associant toutes les forces vives du pays, permettra de restaurer la légitimité des institutions et de prévenir une nouvelle crise.
Perspectives et recommandations
Pour sortir de l’impasse, le Tchad doit impérativement renouer avec les principes de l’État de droit, garantir l’indépendance de la justice et créer les conditions d’un dialogue politique sincère. La libération des prisonniers politiques, la protection des libertés publiques et l’organisation d’élections transparentes sont des préalables indispensables à la stabilité et à la paix.
La société civile et la jeunesse, moteurs du changement, doivent être pleinement associées à la réflexion sur l’avenir du pays. La communauté internationale, quant à elle, doit soutenir les efforts de médiation et conditionner son aide à des avancées concrètes en matière de gouvernance démocratique.
Conclusion
Le report de l’audition de Succès Masra illustre les fragilités de la transition politique tchadienne et la persistance des pratiques autoritaires. Il met en lumière l’urgence d’un sursaut démocratique et d’un dialogue inclusif pour éviter une nouvelle dérive autoritaire. L’avenir du Tchad dépendra de la capacité de ses dirigeants à écouter les aspirations de la population et à engager de véritables réformes.