Introduction
Le Tchad traverse une nouvelle zone de turbulences politiques avec l’arrestation, le 19 mai 2025, de l’ex-Premier ministre Succès Masra. Figure de l’opposition et acteur central de la transition post-Déby, Masra a été interpellé à N’Djamena alors qu’il dénonçait la dérive autoritaire du pouvoir militaire. Cet événement, loin d’être isolé, s’inscrit dans une séquence de tensions croissantes entre la junte au pouvoir, la société civile et les acteurs régionaux. L’arrestation de Masra marque-t-elle un point de non-retour dans la crise tchadienne ? Quels sont les enjeux pour la stabilité du pays et de la région sahélienne ?
Un contexte de transition sous haute tension
Depuis la mort du président Idriss Déby Itno en avril 2021 et la prise de pouvoir de son fils Mahamat Idriss Déby, le Tchad vit une transition politique fragile. Malgré la promesse d’élections libres, la junte militaire a multiplié les mesures de restriction des libertés, la répression des manifestations et les arrestations d’opposants. Succès Masra, ancien économiste de la Banque africaine de développement et leader du parti Les Transformateurs, était devenu l’un des principaux porte-voix de la contestation.
Les motifs de l’arrestation
Selon les autorités, Masra est accusé d’« incitation à l’insurrection », de « trouble à l’ordre public » et de « collusion avec des puissances étrangères ». Ses partisans dénoncent un procès politique et une volonté d’écarter tout concurrent sérieux à l’approche des élections présidentielles annoncées pour fin 2025. Plusieurs ONG, dont Amnesty International et Human Rights Watch, ont condamné une arrestation « arbitraire » et appelé à sa libération immédiate.
Réactions nationales et internationales
La société civile tchadienne s’est mobilisée pour exiger la libération de Masra, organisant des marches pacifiques malgré l’interdiction de manifester. Les réseaux sociaux ont relayé des messages de solidarité venus de toute l’Afrique francophone. Sur le plan international, l’Union africaine, la France et les États-Unis ont exprimé leur préoccupation, appelant au respect des droits de l’homme et à la reprise du dialogue inclusif.
Les risques pour la stabilité du Tchad
L’arrestation de Masra risque d’exacerber les tensions dans un pays déjà fragilisé par les conflits intercommunautaires, la menace djihadiste au nord et à l’est, et la crise humanitaire. De nombreux observateurs redoutent une radicalisation de l’opposition et une montée des violences, dans un contexte où l’armée reste le principal arbitre du pouvoir.
Vers une sortie de crise ?
La libération de Masra et l’ouverture de négociations inclusives sont perçues comme des conditions indispensables pour éviter l’enlisement de la crise. La communauté internationale, bien que soucieuse de la stabilité du Tchad – pivot stratégique dans la lutte contre le terrorisme au Sahel –, est de plus en plus pressée de voir émerger une transition démocratique crédible.
Conclusion
L’arrestation de Succès Masra symbolise l’impasse politique dans laquelle se trouve le Tchad. Plus que jamais, le pays a besoin d’un sursaut démocratique et d’un dialogue sincère entre toutes les forces vives. L’avenir du Tchad, et au-delà celui de la stabilité sahélienne, dépendra de la capacité des acteurs à privilégier la concertation sur la répression.