Introduction
La Roumanie traverse en 2025 l’une des plus graves crises politiques de son histoire récente. Après l’annulation du scrutin présidentiel de novembre 2024, le pays est plongé dans une période d’incertitude institutionnelle, marquée par la montée fulgurante de l’extrême droite, des accusations d’ingérence étrangère et une défiance généralisée envers les partis traditionnels. À quelques semaines d’une nouvelle élection prévue en mai, la société roumaine s’interroge sur la solidité de sa démocratie, la capacité de ses institutions à résister aux pressions internes et externes, et l’avenir de son ancrage européen.
Annulation du scrutin et ingérences étrangères
Le 24 novembre 2024, le premier tour de l’élection présidentielle roumaine voit émerger en tête Călin Georgescu, candidat d’extrême droite et ouvertement prorusse. Mais la Cour constitutionnelle annule le scrutin début décembre, invoquant des irrégularités majeures, dont des soupçons d’ingérence russe via les réseaux sociaux, notamment TikTok. Cette décision, qualifiée d’« historique et sans précédent » par les analystes, polarise la société et soulève de sérieuses questions sur la solidité des institutions démocratiques du pays.
Montée de l’extrême droite et fractures politiques
Les partis d’extrême droite, longtemps marginaux, connaissent une progression spectaculaire, passant de 9 % des voix aux législatives de 2020 à 32 % en 20241. Le discours anti-UE, anti-OTAN et prorusse de Călin Georgescu séduit une partie de la population, lassée de la corruption et de l’inefficacité des partis pro-européens. Mais son exclusion de la présidentielle de mai 2025, décidée par la commission électorale pour violations des règles démocratiques et fausses déclarations sur le financement de sa campagne, provoque des manifestations massives et des incidents violents à Bucarest.
Crise institutionnelle et démission du président
Dans ce contexte explosif, le président Klaus Iohannis annonce sa démission en février 2025 afin d’éviter une procédure de destitution initiée par une alliance inédite de l’extrême droite et de l’opposition pro-européenne56. Ilie Bolojan, président du Sénat, assure l’intérim jusqu’à la nouvelle élection prévue les 4 et 18 mai. La classe politique est profondément divisée, et la société civile manifeste son inquiétude face à la montée des discours haineux et à la remise en cause des valeurs démocratiques.
Réactions nationales et internationales
La rue roumaine se mobilise : des milliers de manifestants brandissent le drapeau européen pour défendre l’UE et dénoncer la « marée brune » de l’extrême droite1. L’invalidation de la candidature de Georgescu est saluée par certains comme un rempart contre l’autoritarisme, tandis que ses partisans dénoncent une « dictature » et un « coup d’État », attisant la tension17. L’Union européenne et l’OTAN suivent la situation de près, inquiets de la stabilité d’un pays clé de la région, alors que la Russie est accusée de multiplier les actions hybrides pour déstabiliser la Roumanie.
Enjeux pour l’avenir
La Roumanie doit organiser des élections libres et crédibles dans un climat de défiance et de polarisation extrême. La capacité des institutions à garantir la transparence du scrutin, à lutter contre les ingérences étrangères et à préserver l’État de droit sera déterminante pour l’avenir du pays et de son ancrage européen. La société civile, les médias indépendants et les partenaires internationaux ont un rôle crucial à jouer pour soutenir la démocratie roumaine dans cette période critique.
Conclusion
La Roumanie, à la croisée des chemins, doit relever le défi de la résilience démocratique face à la montée des extrêmes, aux ingérences étrangères et à la crise de confiance dans ses institutions. Le scrutin de mai 2025 sera un test majeur pour la démocratie roumaine et pour la stabilité de l’Europe de l’Est.