Au cœur de l’Afrique de l’Est, en Ouganda, un sport ancestral connaît un renouveau spectaculaire : la lutte de boue, appelée localement « soft ground wrestling ». Popularisée depuis quelques années, cette discipline singulière attire une jeunesse enthousiaste, réinvente les traditions et suscite un véritable engouement national et international.
Origines et spécificités de la lutte de boue
La lutte de boue ou « bulo » est une pratique traditionnelle pratiquée dans certaines communautés rurales ougandaises. Cette discipline consiste à s’affronter dans un ring naturel, fait de terre mouillée, où les lutteurs doivent s’affronter en utilisant force, technique et agilité, sans protections modernes, uniquement un sol de boue qui amortit les chutes.
Cette pratique est encadrée par des règles précises mais s’inscrit dans une tradition populaire mêlant compétition sportive et rituels culturels. Elle accompagne souvent des cérémonies communautaires en lien avec des fêtes ou des rites d’initiation.
Une renaissance portée par la jeunesse
Depuis 2023, la lutte de boue a gagné en visibilité grâce à l’initiative de jeunes passionnés, réunis autour de centres d’entraînement comme la Bumbash Wrestling Academy à Mukono, près de Kampala. Le fondateur, Daniel Bumba, un ancien commentateur de catch américain en langue locale, a su moderniser ce sport en y apportant un encadrement, des compétitions régulières et une forte utilisation des réseaux sociaux.
Les vidéos de combats spectaculaires, avec leurs projections acrobatiques et leurs sauts périlleux, ont cumulé des centaines de millions de vues sur TikTok, YouTube et Facebook, rendant ce sport viral auprès des jeunes Ougandais et à travers le continent.
Impact culturel et social
Au-delà du spectacle, la lutte de boue joue un rôle de facteur d’intégration et d’émancipation. La discipline attire aussi bien des hommes que des femmes, donnant aussi une nouvelle dimension aux questions d’égalité et d’émancipation des jeunes filles.
Pour de nombreux jeunes, ce sport est une échappatoire aux difficultés économiques et sociales, un moyen d’acquérir discipline, confiance et reconnaissance. Plusieurs lutteurs en herbe témoignent que cette pratique leur a permis de surpasser leurs difficultés personnelles et de développer un sens fort de la communauté et de la fierté.

Enjeux économiques et perspectives
Avec son caractère populaire et accessible, la lutte de boue constitue une nouvelle industrie culturelle émergente. Les événements attirent des spectateurs locaux et des touristes, créant des opportunités économiques pour les artisans, commerçants et prestataires locaux.
Le gouvernement ougandais, conscient de l’intérêt croissant, envisage une reconnaissance officielle de cette discipline et des investissements pour promouvoir le sport traditionnel en parallèle avec le sport moderne.
Définitions et craintes sanitaires
Si cette pratique connait un succès croissant, certaines voix s’inquiètent des risques liés à la nature rudimentaire du matériel et à l’intensité des combats, parfois source de blessures. Les organisateurs et entraîneurs militent cependant pour un encadrement strict, une formation à la sécurité et une sensibilisation accrue pour minimiser les risques physiques.