L’Ouganda vient de franchir une étape controversée dans son système judiciaire : désormais, les civils accusés de certaines infractions graves pourront être jugés devant des tribunaux militaires. Cette mesure, annoncée par les autorités ougandaises, suscite de vives inquiétudes parmi les défenseurs des droits humains, qui dénoncent un recul des garanties fondamentales et une menace pour l’État de droit dans le pays.
Contexte et justification officielle
Le gouvernement ougandais justifie cette réforme par la nécessité de lutter plus efficacement contre la criminalité organisée, le terrorisme et les atteintes à la sûreté de l’État. Selon Kampala, les tribunaux militaires seraient mieux équipés pour traiter rapidement des affaires impliquant des réseaux criminels ou des actes de violence armée, dans un contexte régional marqué par l’instabilité et la menace des groupes rebelles.
Le président Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 1986, a toujours fait de la sécurité nationale une priorité. Il estime que le recours aux juridictions militaires permettra de renforcer la dissuasion et de garantir la stabilité du pays face aux menaces internes et externes.
Les critiques de la société civile
Pourtant, cette décision est loin de faire l’unanimité. Les ONG ougandaises et internationales, telles qu’Amnesty International et Human Rights Watch, dénoncent une atteinte grave aux droits fondamentaux des citoyens. Elles rappellent que les tribunaux militaires, par leur nature même, ne garantissent pas toujours l’indépendance et l’impartialité requises pour juger des civils.
Les défenseurs des droits humains craignent que cette réforme ne soit utilisée pour réprimer l’opposition politique, les journalistes et les militants de la société civile. Plusieurs cas récents de détentions arbitraires et de procès expéditifs ont déjà été signalés, alimentant les inquiétudes sur l’état de la justice en Ouganda.
Les implications pour l’État de droit
L’introduction des tribunaux militaires pour juger les civils pose des questions de conformité avec la Constitution ougandaise et les engagements internationaux du pays en matière de droits humains. De nombreux juristes estiment que cette mesure viole le principe du double degré de juridiction et le droit à un procès équitable.

Au-delà du cas ougandais, cette évolution inquiète d’autres pays africains, où la tentation d’élargir les compétences des juridictions militaires est parfois forte, notamment en période de crise sécuritaire.
Les réactions internationales
La communauté internationale, notamment l’Union africaine et l’Union européenne, a exprimé ses préoccupations face à cette réforme. Des appels ont été lancés pour que l’Ouganda respecte ses obligations internationales et garantisse la protection des droits fondamentaux de ses citoyens.
Certains partenaires bilatéraux ont menacé de revoir leur coopération judiciaire et sécuritaire avec Kampala si la mesure n’était pas encadrée par des garanties strictes.
Conclusion
La décision de l’Ouganda de permettre aux tribunaux militaires de juger les civils marque un tournant préoccupant pour la justice et l’État de droit dans le pays. Pour Africanova, il est essentiel de suivre de près cette évolution et de donner la parole aux acteurs de la société civile qui luttent pour la défense des droits humains.