Introduction : Kiev sous pression européenne pour sa transparence
Le 24 juillet 2025, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a publiquement demandé à Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine, de « fournir des explications immédiates » concernant la récente loi adoptée à Kiev, loi qui affaiblit considérablement l’indépendance des agences anticorruption du pays. L’affaire secoue non seulement la scène politique ukrainienne, mais met aussi en péril les relations stratégiques entre l’Ukraine et l’Union européenne, dans un contexte d’aspirations à l’intégration et de guerre persistante avec la Russie.
Une loi controversée au cœur du débat
Au début du mois de juillet 2025, le Parlement ukrainien a adopté, sous l’impulsion de certains membres de la majorité présidentielle, une réforme réduisant l’autonomie de la NABU (Bureau national anticorruption) et de la SAPO (parquet anticorruption spécialisé). Cette loi permet notamment au gouvernement et au président de nommer ou de révoquer les responsables de ces agences sans contre-pouvoir, affaiblissant ainsi le contrôle citoyen et judiciaire promis lors des précédentes réformes.
De nombreux acteurs locaux, journalistes d’investigation et ONG ukrainiennes, ont dénoncé un “retour en arrière politique” qui pourrait ouvrir la porte à de nouveaux réseaux de corruption.
Les exigences européennes : conditionnalité et élargissement
L’UE, principal bailleur et soutien politique de l’Ukraine, fait de la lutte contre la corruption et de l’État de droit des critères incontournables pour tout rapprochement institutionnel :
- Le décaissement d’aides financières, la poursuite des livraisons d’armes, ainsi que le début concret des négociations d’adhésion à l’UE dépendent du respect de la transparence et de l’indépendance judiciaire.
- Les eurodéputés et les commissaires insistent : « Aucun compromis ne sera accepté sur l’autonomie des agences de lutte contre la corruption », déclarait récemment Vera Jourova, vice-présidente de la Commission.
Bruxelles exige à présent qu’un rapport explicite soit remis d’ici la rentrée, sous peine de suspension de certains financements prévus en automne.
Les réactions à Kiev : dilemme politique majeur
Face à la pression, l’entourage de Zelensky affirme vouloir rouvrir le dialogue, mais justifie la loi par la nécessité d’“efficacité et de stabilité” en période de conflit. Des manifestations importantes rassemblent depuis plusieurs jours à Kiev, Kharkiv et Lviv des milliers de citoyens inquiets de voir le risque de retour à l’arbitraire, symbole d’un passé jugé révolu.
Des conseillers européens sont dépêchés sur place pour accompagner un possible rétropédalage législatif, mais la question demeure épineuse : comment concilier réforme institutionnelle rapide (pour faire face à l’agression russe) et construction d’un état transparent régi par une séparation claire des pouvoirs ?

Conséquences possibles et prochaines étapes
Un gel des aides de l’UE — ou même une suspension des négociations d’adhésion — serait un revers considérable pour Kiev, déjà très dépendante du soutien économique et militaire occidental dans la phase actuelle du conflit. Pour Bruxelles, il s’agit aussi d’un test de crédibilité : la bonne gouvernance reste un pilier fondateur et une différenciation claire par rapport au modèle russe.
Conclusion
Entre attentes démocratiques et nécessités de guerre, le bras de fer entre Bruxelles et Kiev cristallise tous les dilemmes d’une Europe en crise. Reste à savoir si l’Ukraine saura rassurer ses partenaires sans sacrifier la dynamique de réformes qui a fait sa réputation ces dernières années.