Nairobi sous les eaux : une catastrophe naturelle et humaine
La capitale kényane, Nairobi, a été frappée ces derniers jours par de violentes inondations, conséquence de pluies torrentielles qui se sont abattues sans discontinuer sur la ville et sa périphérie. Le bilan provisoire fait état de six morts, de plusieurs dizaines de blessés et de milliers de personnes déplacées. Les images de quartiers entiers submergés, de routes coupées et de familles réfugiées sur les toits témoignent de l’ampleur du désastre. Ce nouvel épisode dramatique relance le débat sur la vulnérabilité des grandes villes africaines face au changement climatique et sur l’urgence d’une adaptation urbaine.
Les faits : un épisode pluvieux d’une intensité exceptionnelle
Depuis le début de la semaine, Nairobi et ses environs subissent des précipitations d’une rare intensité. Selon le service météorologique kényan, il est tombé en 48 heures l’équivalent d’un mois de pluie. Les principaux cours d’eau – la rivière Nairobi et la Ngong – sont sortis de leur lit, inondant les quartiers de Mathare, Kibera, South C et Westlands. Plusieurs ponts ont été emportés, des routes principales coupées, et des glissements de terrain ont été signalés dans les collines environnantes.
Les secours, mobilisés en urgence, ont évacué plus de 3 000 personnes, principalement dans les bidonvilles où les habitations précaires n’offrent aucune résistance face à la montée des eaux. Des centres d’accueil temporaires ont été ouverts dans des écoles et des églises, mais la promiscuité et le manque d’équipements rendent la situation difficile.
Un bilan humain et matériel lourd
Le dernier bilan communiqué par la Croix-Rouge kényane fait état de six morts, dont deux enfants emportés par les flots à Kibera, le plus grand bidonville d’Afrique de l’Est. Des dizaines de blessés ont été hospitalisés, certains dans un état critique. Plusieurs personnes sont toujours portées disparues, et les recherches se poursuivent dans les zones les plus touchées.
Sur le plan matériel, les dégâts sont considérables : destruction de centaines d’habitations, effondrement de murs, coupures d’électricité et d’eau potable, perte de bétail et de récoltes dans les zones périurbaines. Les marchés de Gikomba et de Toi, essentiels pour l’approvisionnement de la ville, ont été inondés, provoquant une flambée des prix des denrées alimentaires.
Les causes : urbanisation anarchique et vulnérabilité structurelle
Si les pluies ont été exceptionnellement fortes, les experts soulignent que la catastrophe est aussi le résultat d’une urbanisation rapide et mal maîtrisée. Nairobi a vu sa population exploser ces vingt dernières années, passant de 2 à plus de 5 millions d’habitants, sans que les infrastructures suivent. Les constructions illégales sur les berges des rivières, le manque de drainage, l’absence de planification urbaine et la déforestation des collines environnantes aggravent les risques d’inondation.
Le maire de Nairobi, John Mwangi, reconnaît la gravité de la situation : « Nous payons aujourd’hui le prix de décennies de négligence. Il est urgent d’investir dans les infrastructures, de reloger les populations les plus vulnérables et de restaurer les écosystèmes urbains. »
Les conséquences sanitaires et sociales
Au-delà des pertes humaines et matérielles, les inondations font planer une menace sanitaire majeure. Les eaux stagnantes favorisent la prolifération du paludisme, du choléra et d’autres maladies hydriques. Les centres de santé, déjà sous pression, peinent à faire face à l’afflux de patients et au manque de médicaments.
Les écoles de plusieurs quartiers restent fermées, privant des milliers d’enfants de cours. Les familles déplacées, souvent très pauvres, ont tout perdu et dépendent désormais de l’aide humanitaire. Les ONG appellent à une mobilisation rapide pour fournir nourriture, eau potable, couvertures et produits d’hygiène.
Les réactions et la solidarité
La catastrophe a suscité une vague de solidarité à Nairobi et dans tout le pays. Des collectes de fonds et de vivres sont organisées par des associations, des entreprises et des particuliers. Le gouvernement kényan a débloqué une aide d’urgence et promis de reloger les sinistrés dans des logements temporaires. L’Union africaine et plusieurs pays voisins ont proposé leur assistance.

Sur les réseaux sociaux, de nombreux Kényans dénoncent l’inaction des autorités et appellent à une réforme en profondeur de la gestion urbaine et environnementale. Le hashtag #NairobiFloods est en tête des tendances, alimentant le débat sur la résilience des villes africaines.
Le défi du changement climatique
Les inondations de Nairobi s’inscrivent dans une tendance plus large : la multiplication des événements climatiques extrêmes en Afrique de l’Est. Sécheresses prolongées, épisodes de pluies diluviennes, montée du niveau des eaux : le continent est en première ligne face au changement climatique, alors qu’il est pourtant responsable de moins de 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Les experts appellent à intégrer l’adaptation climatique dans toutes les politiques urbaines : renforcement des systèmes de drainage, reforestation, relocalisation des populations à risque, construction de logements résilients, éducation à la gestion des catastrophes.
Perspectives : repenser la ville africaine
La tragédie de Nairobi doit servir de leçon pour l’ensemble des métropoles africaines. L’urbanisation rapide, si elle n’est pas accompagnée d’une planification rigoureuse et d’investissements massifs dans les infrastructures, expose des millions de citadins à des risques majeurs. Les autorités, les urbanistes, les bailleurs de fonds et la société civile doivent travailler ensemble pour bâtir des villes plus sûres, plus vertes et plus inclusives.
Conclusion : Nairobi, symbole des défis urbains africains face au climat
Les inondations qui frappent Nairobi rappellent l’urgence d’agir pour protéger les plus vulnérables et adapter les villes africaines aux réalités du XXIe siècle. C’est un défi immense, mais aussi une opportunité de repenser le développement urbain au service de tous.