C’est désormais devant les tribunaux que se joue l’un des plus grands bras de fer de la décennie entre une prestigieuse université américaine et l’ex-président Donald Trump : l’Université Harvard, fleuron de la recherche mondiale, a entamé une action en justice contre l’administration Trump pour rétablir des fonds suspendus en 2024, accusant le gouvernement d’avoir cédé à la pression politique et aux polémiques sur l’antisémitisme présumé sur les campus. Au-delà d’une dispute budgétaire, cette affaire cristallise les tensions croissantes autour de la liberté académique, du rôle des universités dans le débat public et de la frontière entre critique d’Israël et haine raciale.
Contexte explosif sur les campus américains
Tout a commencé avec la montée d’une série de manifestations pro-palestiniennes à Harvard et dans d’autres universités d’élite américaines lors du conflit intense de 2024 à Gaza. Plusieurs organisations étudiantes ont dénoncé ce qu’elles considéraient comme des “crimes de guerre” israéliens ; en réaction, des groupes pro-israéliens ont dénoncé un climat grandissant d’antisémitisme. Exploité politiquement, l’affaire prend de l’ampleur : Donald Trump, en pleine campagne de retour, fait suspendre plus de 250 millions de dollars de financements fédéraux accordés à la recherche à Harvard, évoquant la nécessité de “préserver la sécurité de tous les étudiants, quels qu’ils soient”.
Harvard contre-attaque : la défense de la liberté académique
Face à ce gel jugé arbitraire et politiquement motivé, les dirigeants de Harvard déposent plainte. Ils accusent l’administration Trump d’instrumentaliser l’antisémitisme pour les punir de leur “ouverture au débat” et de leur “tolérance” à toutes les opinions, même clivantes. “L’université n’est pas le lieu de la censure ou du chantage financier : c’est le cœur du débat sur la citoyenneté”, plaide Lawrence Bacow, président de Harvard.
Le procès devient un symbole : des centaines de professeurs, mais aussi d’universitaires africains en poste à Boston, s’érigent en défenseurs de la liberté intellectuelle. Le procès, ultra-médiatisé, divise l’opinion : pour certains, Harvard a laissé se développer un climat d’intolérance ; pour d’autres, l’université protège la diversité des voix.

Un débat mondial sur le campus et l’antisémitisme
Ce différend révèle des lignes de fracture profondes sur la place de l’antisémitisme dans les sociétés occidentales, la liberté de manifester, la critique de la politique israélienne et la gestion de la parole minoritaire sur les campus. Des associations de défense des droits humains craignent que le précédent crée un climat d’autocensure dans le monde universitaire, y compris en Afrique, où les universités commencent à faire face à des débats intenses sur la citoyenneté, la religion et les alliances internationales.
Des étudiants africains à Harvard témoignent : “Nous sentons la pression, y compris en tant qu’Africains, de ne pas dépasser la ligne. Le savoir doit rester un espace ouvert… sinon, c’est la démocratie qui meurt.”
Vers une redéfinition du rôle universitaire ?
Ce procès pourrait avoir des répercussions profondes pour les universités américaines et leurs partenaires à l’international : contrôle des fonds, surveillance de la parole, encadrement de la recherche et du militantisme. L’affaire Harvard-Trump cristallise une époque de remises en question mondiales sur l’identité, la différence et le droit à la critique, dans et au-delà du campus.