Guinée : Feuille de route vers les élections, obstacles et perspectives

Guinée : Transition politique sous tension – Entre incertitudes, attentes citoyennes et quête d’un retour à l’ordre constitutionnel

Conakry, 23 avril 2025 –
La Guinée, pays charnière d’Afrique de l’Ouest, traverse une période charnière de son histoire politique. Depuis le coup d’État de septembre 2021 qui a renversé Alpha Condé, la transition menée par le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) reste sous haute tension. À l’approche des échéances électorales promises, la société guinéenne oscille entre espoir de changement, frustrations face à la lenteur du processus et inquiétudes sur la sincérité du retour à l’ordre constitutionnel.

Un calendrier électoral sous surveillance

Après de nombreux reports et des négociations tendues avec la CEDEAO, la junte au pouvoir a fini par présenter une feuille de route détaillant les étapes menant aux élections générales. Ce calendrier, qui prévoit un référendum constitutionnel suivi de scrutins locaux, législatifs et présidentiel, est scruté à la loupe par les partenaires internationaux et la société civile. Mais la confiance reste fragile : plusieurs acteurs politiques et organisations citoyennes dénoncent l’absence de garanties concrètes sur la tenue effective des scrutins et la transparence du processus.

Les obstacles majeurs à la transition

La réussite de cette transition dépend de la résolution de plusieurs défis de taille :

  • Dialogue politique difficile : Les relations entre la junte, les partis d’opposition et la société civile sont marquées par la méfiance. Les tentatives de dialogue inclusif sont régulièrement entravées par des arrestations, des restrictions de manifestations et des accusations de manipulation du processus.
  • Insécurité et tensions sociales : Les manifestations contre la transition, souvent réprimées, témoignent d’un climat social tendu. Les violences policières, les coupures d’internet lors des mobilisations et la détention d’opposants alimentent la défiance.
  • Économie en berne : La crise politique a aggravé la situation économique. Inflation, chômage, dépréciation du franc guinéen et suspension de certains financements internationaux pèsent lourdement sur le quotidien des Guinéens.
  • Réformes institutionnelles inachevées : La révision constitutionnelle, la refonte du fichier électoral et la recomposition de la Commission électorale indépendante (CENI) avancent lentement, faute de consensus et de moyens.

La société civile en première ligne

Face à ces incertitudes, la société civile guinéenne joue un rôle central. Plateformes citoyennes, syndicats, associations de jeunes et de femmes multiplient les initiatives pour exiger un processus transparent, inclusif et respectueux des droits humains. Des campagnes de sensibilisation et de mobilisation sont menées dans tout le pays, malgré les risques de répression. Les leaders religieux, traditionnellement influents, tentent de jouer les médiateurs pour éviter l’escalade.

La pression de la CEDEAO et des partenaires internationaux

La CEDEAO, qui a déjà sanctionné la Guinée à plusieurs reprises, continue de réclamer un calendrier électoral crédible et des avancées concrètes. Les partenaires bilatéraux, notamment l’Union européenne et les États-Unis, conditionnent leur soutien financier et technique à la progression de la transition. Le risque de nouvelles sanctions, voire d’un isolement diplomatique, plane si la junte ne respecte pas ses engagements.

Quelles perspectives pour un retour à l’ordre constitutionnel ?

Malgré les obstacles, des signaux positifs émergent. La nomination d’une nouvelle équipe à la CENI, l’ouverture de certains espaces de dialogue et la reprise partielle de l’aide internationale sont perçus comme des avancées. Mais la réussite de la transition dépendra de la capacité des autorités à garantir la liberté d’expression, la sécurité des acteurs politiques et la transparence du processus électoral.

Le retour à l’ordre constitutionnel est une condition sine qua non pour restaurer la confiance des citoyens et des investisseurs, relancer l’économie et renforcer la stabilité régionale. La Guinée, riche de sa jeunesse et de ses ressources, a le potentiel pour réussir ce pari, à condition que la transition soit inclusive, sincère et respectueuse des aspirations populaires.

Conclusion

La transition guinéenne reste un test pour la démocratie en Afrique de l’Ouest. Entre espoirs et incertitudes, la société civile et les partenaires internationaux attendent des actes forts pour garantir un retour effectif à l’ordre constitutionnel. L’avenir du pays dépendra de la capacité de ses dirigeants à privilégier le dialogue, l’inclusion et la transparence.

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