Guinée-Bissau : Dissolution du parlement, bras de fer avec la CEDEAO

Guinée-Bissau : Crise institutionnelle profonde – La dissolution du parlement plonge le pays dans l’incertitude

Bissau, 23 avril 2025 –
La Guinée-Bissau, petit État d’Afrique de l’Ouest habitué aux crises politiques récurrentes, traverse une nouvelle tempête institutionnelle. La dissolution du parlement par le président Umaro Sissoco Embaló en décembre 2024 a ouvert une période d’incertitude et de tensions, marquée par un bras de fer inédit avec la CEDEAO. Cette crise met en lumière la fragilité des institutions bissau-guinéennes et les défis de la gouvernance dans un pays clé pour la stabilité régionale.

Une dissolution controversée

Le président Embaló a justifié la dissolution du parlement par des « blocages institutionnels » et des « tentatives de déstabilisation » orchestrées, selon lui, par l’opposition. Mais cette décision, jugée unilatérale et précipitée par de nombreux observateurs, a plongé le pays dans une impasse politique. Le gouvernement de transition, nommé dans la foulée, peine à obtenir l’adhésion des principaux partis et de la société civile, qui dénoncent un « coup de force » et réclament la tenue rapide de nouvelles élections.

La CEDEAO en médiateur sous pression

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), traditionnellement très impliquée dans la gestion des crises bissau-guinéennes, a rapidement dépêché une mission de médiation à Bissau. L’organisation régionale, qui a déjà menacé de sanctions ciblées, exige la restauration du dialogue politique, la protection des droits fondamentaux et la fixation d’un calendrier électoral crédible.

Mais la marge de manœuvre de la CEDEAO est limitée : le président Embaló, fort du soutien d’une partie de l’armée et de certains partenaires internationaux, résiste aux pressions extérieures. Les négociations piétinent, et le risque d’une escalade des tensions n’est pas à écarter.

Des institutions fragilisées et une société civile inquiète

La crise actuelle révèle la faiblesse structurelle des institutions bissau-guinéennes. Le système judiciaire, perçu comme politisé, peine à jouer son rôle d’arbitre impartial. Les forces de sécurité, historiquement impliquées dans la vie politique, restent une variable d’ajustement dans le rapport de force entre exécutif et opposition.

La société civile, quant à elle, multiplie les appels au dialogue et à la préservation de la paix. Des manifestations pacifiques ont eu lieu à Bissau et dans plusieurs villes du pays, malgré les risques de répression. Les ONG locales et internationales insistent sur la nécessité de protéger les droits humains et de garantir la liberté d’expression.

Conséquences économiques et sociales

La crise politique a des répercussions immédiates sur l’économie, déjà fragile. Les investissements sont en berne, l’aide internationale suspendue ou conditionnée à la résolution de la crise, et la pauvreté s’aggrave. Les secteurs clés, comme la noix de cajou (première ressource d’exportation), subissent les effets de la paralysie institutionnelle.

Quels scénarios pour la sortie de crise ?

Plusieurs scénarios se dessinent pour les prochains mois. Une issue négociée, avec la formation d’un gouvernement d’union nationale et la tenue d’élections anticipées, est privilégiée par la CEDEAO et la communauté internationale. Mais le risque d’un enlisement, voire d’un nouveau coup de force, n’est pas à exclure dans un pays où l’armée a souvent joué les arbitres.

Conclusion

La Guinée-Bissau se trouve à un carrefour décisif. La résolution de la crise actuelle dépendra de la capacité des acteurs politiques à privilégier le dialogue, à renforcer les institutions et à répondre aux attentes de la population. Pour la CEDEAO, il s’agit aussi de préserver sa crédibilité en tant que garant de la stabilité régionale.

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