Introduction
L’Éthiopie, pays emblématique de la Corne de l’Afrique, reste sous haute tension malgré la signature d’un accord de paix entre le gouvernement fédéral et les autorités du Tigré. Depuis la fin de la guerre civile en novembre 2022, la paix demeure précaire, minée par les suspicions, les retards dans la mise en œuvre des engagements et la persistance de violences sporadiques. L’avenir de la réconciliation nationale et de la stabilité régionale dépend de la capacité des parties à tenir leurs promesses et à restaurer la confiance.
Contexte : une guerre civile dévastatrice
Entre novembre 2020 et novembre 2022, l’Éthiopie a été le théâtre d’un conflit sanglant opposant le gouvernement fédéral, dirigé par le Premier ministre Abiy Ahmed, à la région du Tigré, sous la direction du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Ce conflit, marqué par des atrocités, des blocus humanitaires et des accusations de crimes de guerre, a fait des centaines de milliers de morts, des millions de déplacés et des destructions massives.
La signature de l’accord de paix de Pretoria, sous l’égide de l’Union africaine, a permis un cessez-le-feu et la levée du blocus sur le Tigré. Cependant, la paix reste fragile, car les blessures du conflit sont profondes et les griefs nombreux de part et d’autre.
Les termes de l’accord de paix
L’accord de Pretoria prévoit plusieurs mesures clés :
- Le désarmement des combattants du TPLF et leur intégration dans les forces de sécurité nationales.
- La levée du blocus humanitaire et la reprise de l’aide internationale dans la région du Tigré.
- Le rétablissement des services publics (électricité, télécommunications, routes).
- La création d’une commission de justice transitionnelle pour enquêter sur les crimes commis pendant la guerre.
- La tenue d’élections régionales sous supervision internationale.
Les obstacles à la mise en œuvre
Malgré ces engagements, la mise en œuvre de l’accord se heurte à de nombreux obstacles :
- Le manque de confiance : les Tigréens accusent le gouvernement central de ne pas respecter ses promesses, notamment en matière de rétablissement des services et de justice.
- Les retards dans la reconstruction : la plupart des infrastructures du Tigré sont détruites, et la reconstruction avance lentement, faute de moyens et de coordination.
- La persistance des violences : des affrontements sporadiques continuent d’opposer l’armée éthiopienne à des groupes armés locaux, et des milices amhara commettent des exactions dans les zones contestées.
- La crise humanitaire : des millions de personnes dépendent encore de l’aide alimentaire, et les organisations humanitaires peinent à accéder à certaines zones.
Le rôle de la communauté internationale
La communauté internationale, notamment l’Union africaine, l’ONU et les États-Unis, suit de près l’évolution de la situation. Elle appelle à la pleine application de l’accord de paix, à la levée des obstacles à l’aide humanitaire et à la tenue de procès équitables pour les crimes commis.
L’Union africaine a déployé une mission de surveillance pour suivre le désarmement et la réintégration des combattants, mais son mandat reste limité et ses moyens insuffisants.
Les conséquences pour la société éthiopienne
La paix fragile au Tigré a des répercussions sur toute la société éthiopienne. Les déplacés peinent à rentrer chez eux, les familles sont séparées, et la méfiance entre communautés demeure. La guerre a exacerbé les tensions ethniques et religieuses, et la réconciliation nationale semble encore lointaine.

Les jeunes, en particulier, souffrent du manque de perspectives et de la destruction des infrastructures éducatives. Beaucoup rejoignent des groupes armés ou tentent de quitter le pays, alimentant la crise migratoire régionale.
Les défis à venir
La réussite de la paix en Éthiopie dépendra de plusieurs facteurs :
- La volonté politique : les dirigeants doivent montrer l’exemple en respectant leurs engagements et en promouvant le dialogue.
- La justice transitionnelle : la création d’une commission indépendante pour enquêter sur les crimes de guerre est essentielle pour restaurer la confiance.
- La reconstruction économique : la relance de l’économie du Tigré et du reste du pays est indispensable pour éviter une nouvelle spirale de violence.
- La réconciliation communautaire : des initiatives locales de dialogue et de médiation doivent être encouragées pour apaiser les tensions.
Conclusion
L’accord de paix entre le gouvernement éthiopien et le Tigré reste un espoir fragile pour la stabilité de l’Éthiopie et de la région. Sa réussite dépend de la capacité des parties à surmonter les suspicions, à respecter leurs engagements et à reconstruire une société inclusive et juste. La communauté internationale a un rôle clé à jouer pour accompagner ce processus et éviter une rechute dans la violence.