La politique économique américaine est à la croisée des chemins, alors que Joe Biden et Donald Trump proposent des réformes radicalement différentes pour la première puissance mondiale. Leur opposition ne se limite pas à des choix budgétaires ou fiscaux : elle engage deux philosophies économiques et sociales, dont les effets se font sentir bien au-delà des frontières américaines. Comparer les bilans et les projets de Biden et Trump, c’est éclairer les enjeux majeurs pour l’économie mondiale, de la croissance à l’inflation, en passant par la transition énergétique et la stabilité des marchés.
Sous la présidence de Joe Biden, l’économie américaine a été marquée par une politique de relance massive, centrée sur le soutien à la demande, la réduction des inégalités et la modernisation des infrastructures. Dès son arrivée, Biden a fait adopter un plan de relance de 1 900 milliards de dollars pour soutenir ménages, entreprises et collectivités face à la pandémie, relançant la croissance et ramenant le chômage à des niveaux historiquement bas. Il a aussi mis l’accent sur l’augmentation du salaire minimum fédéral, l’élargissement des crédits d’impôt pour les familles modestes et des investissements majeurs dans l’éducation, la santé, les infrastructures et les énergies propres.
Biden a aussi introduit une dimension environnementale forte, avec le plan « Build Back Better » et l’Inflation Reduction Act, qui visent la neutralité carbone d’ici 2050, la promotion des véhicules électriques et la rénovation énergétique. Sur le plan fiscal, il propose de maintenir certains allègements hérités de Trump pour les classes moyennes, mais d’augmenter les impôts pour les plus riches et les grandes entreprises, tout en renforçant la lutte contre l’optimisation fiscale internationale57. Sa politique commerciale reste ferme avec la Chine, mais privilégie les alliances et les accords multilatéraux pour sécuriser les chaînes d’approvisionnement et soutenir l’innovation technologique.
En contraste, Donald Trump défend une approche résolument axée sur la dérégulation, la baisse des impôts et la protection des industries nationales. Son administration avait baissé l’impôt sur les sociétés de 35 % à 21 %, simplifié la fiscalité pour les particuliers et réduit les contraintes réglementaires, notamment dans l’énergie et la finance. Trump promet, s’il revient au pouvoir, d’étendre encore les baisses d’impôts, notamment pour les entreprises et les hauts revenus, de supprimer les crédits d’impôt pour les énergies renouvelables et de relancer massivement la production de pétrole, gaz et charbon. Il prévoit aussi d’imposer des tarifs douaniers généralisés sur toutes les importations, en particulier celles venant de Chine, et de restreindre fortement l’immigration.
Les impacts de ces deux visions sont mesurables. Selon Moody’s Analytics, les politiques de Biden favoriseraient une croissance annuelle moyenne de 2,1 % et une inflation mieux contenue, alors que le scénario Trump entraînerait une croissance plus faible (1,3 % par an), une inflation plus élevée, et un chômage plus important2. Le plan Trump, en misant sur les tarifs douaniers et la restriction de l’immigration, risquerait d’alourdir les coûts pour les consommateurs et les entreprises, tout en accentuant les tensions commerciales mondiales . À l’inverse, la stratégie de Biden, plus ouverte sur le monde, mais plus régulée, cherche à conjuguer compétitivité, transition écologique et justice sociale, au prix d’un endettement public qui continue de croître5.
La question de la dette et du déficit structurel reste centrale. Les baisses d’impôts de Trump ont creusé le déficit fédéral de plus de 1 500 milliards de dollars sur dix ans. Biden, de son côté, propose de réduire le déficit par une hausse des recettes fiscales sur les plus aisés, mais la trajectoire de la dette reste ascendante, avec une projection à 106 % du PIB d’ici 2034. Sur le plan mondial, ces choix influencent les flux de capitaux, la stabilité du dollar, les marchés de l’énergie et la dynamique des échanges internationaux.
Enfin, la transition énergétique constitue un point de clivage majeur. Trump nie l’urgence climatique et privilégie les énergies fossiles, alors que Biden fait du climat une priorité, engageant les États-Unis dans la voie de la décarbonation et du leadership vert7. Ce choix pèse sur les investissements mondiaux, les chaînes de valeur industrielles et la diplomatie climatique, alors que l’Europe et la Chine accélèrent aussi leur transition.
En somme, le choix entre Biden et Trump engage l’avenir de l’économie américaine et son rôle dans l’économie mondiale. D’un côté, une politique de relance, d’inclusion et de transition verte ; de l’autre, une stratégie de baisse d’impôts, de protectionnisme et de retour aux énergies fossiles. Le résultat de cette opposition façonnera non seulement la croissance et l’emploi aux États-Unis, mais aussi l’équilibre économique, commercial et environnemental de la planète pour la décennie à venir.