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Côte d’Ivoire : reconduction de la fermeture saisonnière de la pêche, quelles conséquences pour les communautés littorales ?

par Africanova
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Abidjan, 5 juillet 2025 – Entre préservation des ressources et crise sociale

La Côte d’Ivoire vient d’annoncer la reconduction de la fermeture saisonnière de la pêche maritime pour une durée de deux mois, une mesure qui vise à préserver les stocks halieutiques de plus en plus menacés par la surpêche et la dégradation des écosystèmes marins. Si cette décision est saluée par les environnementalistes, elle suscite de vives inquiétudes parmi les communautés littorales, dont la survie dépend directement de la pêche artisanale. Enquête sur les enjeux, les impacts et les alternatives pour des milliers de familles ivoiriennes.

Une mesure écologique devenue incontournable

Depuis 2013, la Côte d’Ivoire applique une fermeture saisonnière de la pêche maritime, généralement entre juillet et septembre, période cruciale pour la reproduction des principales espèces de poissons. Cette mesure, recommandée par les scientifiques et soutenue par la FAO, vise à lutter contre la surpêche, à restaurer les stocks et à garantir la durabilité de la filière halieutique.

Selon le ministère des Ressources animales et halieutiques, les stocks de sardinelles, de thonidés et de crevettes ont chuté de plus de 40 % en dix ans. La pression croissante des chalutiers industriels, souvent étrangers, aggrave la situation, au détriment des pêcheurs artisanaux.

Des conséquences sociales majeures

Pour les communautés littorales, de San Pedro à Grand-Bassam, la fermeture saisonnière représente une période de grande précarité. Près de 200 000 personnes, dont 50 000 pêcheurs artisanaux et leurs familles, voient leurs revenus s’effondrer. Les marchés de poissons frais se raréfient, les prix flambent, et de nombreux ménages peinent à subvenir à leurs besoins.

« C’est une période très difficile. Nous comprenons la nécessité de protéger la mer, mais comment nourrir nos enfants sans travail ? », s’interroge Kouadio, pêcheur à Abidjan. Les femmes, qui assurent la transformation et la vente du poisson, sont particulièrement touchées par la baisse d’activité.

Des aides insuffisantes et mal réparties

Le gouvernement ivoirien a mis en place des mesures d’accompagnement : distribution de vivres, microcrédits, formations à la pisciculture et à d’autres activités génératrices de revenus. Mais sur le terrain, ces aides sont jugées insuffisantes, mal réparties ou détournées par des réseaux clientélistes.

Selon une enquête de l’ONG CREDO, moins de 30 % des pêcheurs déclarent avoir bénéficié d’un soutien effectif. Beaucoup dénoncent la lenteur des procédures, le manque de transparence et l’absence de suivi. Les jeunes, en particulier, se sentent abandonnés et tentés par l’exode vers les villes ou l’émigration clandestine.

L’urgence d’une transition vers la pêche durable

Face à la crise, de nombreuses voix appellent à une réforme en profondeur du secteur. La priorité est donnée à la lutte contre la pêche illégale, à la régulation des chalutiers industriels et à la promotion de la pêche artisanale durable.

Des projets pilotes, soutenus par la Banque mondiale et l’Union européenne, visent à équiper les pêcheurs de matériels sélectifs, à créer des aires marines protégées et à renforcer la surveillance des côtes. La diversification des activités (aquaculture, tourisme, transformation) est encouragée pour réduire la dépendance à la pêche de capture.

Un enjeu de souveraineté alimentaire et de cohésion sociale

La pêche représente 20 % des apports en protéines animales pour les Ivoiriens. La raréfaction du poisson menace la sécurité alimentaire, en particulier dans les régions côtières. La fermeture saisonnière, si elle n’est pas accompagnée de mesures sociales robustes, risque d’aggraver la pauvreté, les tensions communautaires et l’exode rural.

Les autorités ivoiriennes sont donc confrontées à un dilemme : concilier impératifs écologiques et justice sociale, pour éviter que la préservation de la mer ne se fasse au détriment des plus vulnérables.

Conclusion

La reconduction de la fermeture saisonnière de la pêche en Côte d’Ivoire est une mesure nécessaire pour l’avenir des ressources marines, mais elle ne peut réussir sans un véritable accompagnement social et économique des communautés littorales. La transition vers une pêche durable, inclusive et résiliente, est le seul moyen d’assurer la survie des océans… et des hommes qui en vivent.

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