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Côte d’Ivoire : la jeunesse face au chômage malgré la croissance économique

par Africanova
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La Côte d’Ivoire est souvent citée comme un modèle de réussite économique en Afrique de l’Ouest. Depuis plus d’une décennie, le pays affiche des taux de croissance impressionnants, dépassant régulièrement les 6 % par an. Les avenues d’Abidjan s’élargissent, les gratte-ciel poussent, les investissements étrangers affluent, et les grands chantiers d’infrastructures se multiplient. Pourtant, derrière cette vitrine dynamique, un défi de taille persiste : l’insertion professionnelle de la jeunesse, qui peine à trouver sa place dans une économie en pleine mutation.

Une croissance qui ne profite pas à tous

La Côte d’Ivoire est un pays jeune : plus de 60 % de la population a moins de 25 ans. Chaque année, ce sont près de 400 000 nouveaux arrivants qui frappent à la porte du marché de l’emploi. Pourtant, le taux de chômage des jeunes reste élevé, oscillant entre 20 et 30 % selon les estimations, bien au-dessus de la moyenne nationale. Beaucoup de diplômés enchaînent les stages non rémunérés, les petits boulots précaires, ou se tournent vers l’économie informelle, faute d’opportunités stables.

Pour Mariam, 25 ans, titulaire d’un diplôme en gestion, la réalité est crue : « On nous parle de croissance, mais moi, je cherche du travail depuis deux ans. Mes parents se sont sacrifiés pour mes études, et je ne peux même pas les aider. » Son témoignage est partagé par des milliers de jeunes Ivoiriens, notamment dans les quartiers populaires d’Abidjan ou dans les villes de l’intérieur.

Les causes d’un chômage persistant

Plusieurs facteurs expliquent cette difficulté d’insertion. D’abord, la croissance ivoirienne repose encore largement sur l’agriculture (cacao, café, anacarde) et les grands travaux, qui créent peu d’emplois qualifiés. Le secteur industriel, pourtant porteur d’emplois pérennes, reste sous-développé. Par ailleurs, le système éducatif peine à répondre aux besoins du marché : trop de filières généralistes, pas assez de formations techniques ou professionnelles, et un manque de passerelles entre l’école et l’entreprise.

Les entreprises, de leur côté, déplorent la rareté de certains profils techniques et l’inadéquation de la formation aux réalités du terrain. « Nous avons du mal à recruter des techniciens, des ingénieurs, des ouvriers spécialisés. Beaucoup de jeunes diplômés n’ont pas d’expérience pratique », explique le DRH d’une PME du secteur agroalimentaire.

Initiatives publiques et privées

Face à ce constat, l’État ivoirien a lancé plusieurs programmes pour promouvoir l’emploi des jeunes : appui à l’auto-emploi, subventions à l’embauche, développement de l’apprentissage, soutien à l’entrepreneuriat et à l’innovation. Le ministère de la Promotion de la Jeunesse multiplie les forums, les concours de start-ups, les incubateurs. Des plateformes numériques permettent désormais de mettre en relation les jeunes et les employeurs, tandis que des centres de formation professionnelle voient le jour dans les régions.

Le secteur privé s’implique également, à travers des partenariats avec l’État, des stages, des formations en alternance, et des financements de projets innovants. Les grandes entreprises du numérique, de la banque ou des télécommunications investissent dans la formation continue et la détection de talents.

Les freins structurels

Mais les résultats restent en deçà des attentes. L’accès au financement demeure difficile pour les jeunes entrepreneurs, souvent sans garanties ni réseau. L’économie informelle, qui occupe plus de 80 % des jeunes actifs, offre peu de perspectives de carrière et expose à la précarité. Les inégalités territoriales persistent : les opportunités sont concentrées à Abidjan, alors que les régions rurales manquent d’infrastructures et d’investissements.

Par ailleurs, la crise sanitaire liée au Covid-19 a aggravé la situation, ralentissant la croissance et fragilisant les petites entreprises. Beaucoup de jeunes ont dû interrompre leur formation ou renoncer à leurs projets.

Témoignages et initiatives inspirantes

Pourtant, partout dans le pays, des jeunes refusent de baisser les bras. À Bouaké, Sékou, 28 ans, a monté une petite entreprise de transformation de mangues séchées, avec l’aide d’un incubateur local. À Yamoussoukro, Awa, 23 ans, s’est lancée dans la couture et forme désormais d’autres jeunes filles à son métier. « L’État nous encourage, mais il faut se battre tous les jours », confie-t-elle.

Des ONG, des associations et des réseaux d’anciens étudiants jouent aussi un rôle clé dans l’accompagnement, le mentorat et la formation continue. Les réseaux sociaux sont devenus des outils précieux pour partager des offres d’emploi, des conseils et des opportunités.

Un enjeu social et politique majeur

L’insertion des jeunes est un défi central pour la stabilité sociale et politique du pays. Les frustrations liées au chômage peuvent nourrir la colère, l’exode rural, voire l’émigration clandestine. Les attentes en matière de justice sociale, d’égalité des chances et de mobilité sont immenses. Les prochaines élections seront, à n’en pas douter, marquées par la question de l’emploi et de l’avenir de la jeunesse.

Pour la Côte d’Ivoire, réussir le pari de l’insertion des jeunes, c’est garantir une croissance durable, inclusive et porteuse d’espoir pour toute une génération.

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