Introduction : La jeunesse gambienne entre dans la danse
La capitale de la Gambie, Banjul, a connu en ce 24 juillet 2025 sa plus grande mobilisation citoyenne depuis l’avènement du pluralisme politique : des milliers de manifestants, principalement des jeunes, ont envahi les rues pour dénoncer la corruption qui gangrène le pays. Sur fond d’exaspération sociale, d’inflation persistante et d’un manque de perspectives économiques, la colère des Gambiens s’exprime avec vigueur. Derrière les slogans, un message clair : le temps de l’impunité est terminé.
Le contexte : une démocratie jeune confrontée à ses vieux démons
Depuis la transition démocratique de 2017, la Gambie tente de tourner la page de la dictature de Yahya Jammeh. Mais la promesse d’une gouvernance plus responsable peine à se concrétiser.
Le chômage des jeunes dépasse 35 %, l’accès à l’eau et à l’électricité reste précaire hors de la capitale, et les rumeurs de détournements de fonds publics alimentent une défiance accrue envers la classe politique. Les récentes révélations sur des contrats d’État opaques et la hausse inexpliquée du train de vie de certains dirigeants ont mis le feu aux poudres.
La manifestation : mobilisation inédite et mot d’ordre pour la transparence
Organisée par un collectif de la société civile, la marche du 24 juillet a réuni un cortège dense, avec de nombreux étudiants, entrepreneurs, syndicalistes, mais aussi des femmes et des travailleurs du secteur informel. Sur les pancartes : « Stop à la corruption », « Justice pour le peuple », « L’argent public n’est pas privé ».
La mobilisation, pacifique, a fortement perturbé le centre-ville, forçant le gouvernement à réagir rapidement. Certains manifestants, interrogés par Africanova, insistent :
« Notre génération ne veut plus voir les mêmes familles s’enrichir pendant que la pauvreté monte. Nous voulons un audit indépendant et des procès, pas des paroles. »
Les autorités sous pression : promesses et premières mesures
Devant l’ampleur de la contestation, le président Adama Barrow a dû s’exprimer dans la soirée sur les réseaux sociaux, promettant une « tolérance zéro » envers les auteurs de malversations. Il a annoncé l’ouverture d’enquêtes administratives sur certains contrats publics et la suspension temporaire de plusieurs hauts fonctionnaires.
Néanmoins, les opposants politiques dénoncent « des mesures cosmétiques », pointant le manque de condamnations effectives depuis 2017.
L’écho régional : la vague anti-corruption gagne l’Afrique de l’Ouest
La Gambie n’est pas un cas isolé. Depuis 2024, des mouvements similaires agitent le Sénégal, le Nigeria ou le Sierra Leone, signe que la tolérance à la corruption recule partout en Afrique de l’Ouest. L’Union africaine et la CEDEAO encouragent désormais des mécanismes de suivi plus transparents, avec des audits conjoints et des plateformes citoyennes pour dénoncer les abus.

Les enjeux pour la stabilité
La réussite ou l’échec du mouvement de Banjul aura des répercussions sur la légitimité de la transition démocratique en Gambie. Si la pression populaire ne se traduit pas par des réformes réelles – indépendance renforcée de la justice, audit des avoirs publics, ouverture des marchés à la concurrence – le risque d’un retour à l’instabilité et à l’abstention électorale grandit.
Des ONG internationales comme Transparency International appellent à « un électrochoc politique authentique ».
Conclusion
La marche historique du 24 juillet 2025 à Banjul porte l’espoir d’une Gambie nouvelle, libérée des pratiques de corruption qui minent le pays depuis des décennies. Mais la route est longue, et seule la transformation des promesses en actes concrets, visible par toute la population, permettra de restaurer la confiance dans l’État de droit.