Les violences sexuelles liées aux conflits continuent de menacer gravement la paix et la sécurité sur le continent africain, selon un rapport alarmant publié par les Nations Unies ce 30 avril 2025. Ce document, fruit d’une enquête approfondie menée dans plusieurs zones de conflit, révèle l’ampleur et la systématisation de ces crimes, utilisés comme véritables armes de guerre par de nombreux groupes armés et, parfois, par des forces gouvernementales.
Des chiffres qui témoignent d’une crise humanitaire majeure
Le rapport documente plus de 3 500 cas de violences sexuelles liées aux conflits en 2024, une augmentation de 27% par rapport à l’année précédente. Ces chiffres, bien qu’alarmants, ne représentent que la partie visible de l’iceberg, de nombreuses victimes ne signalant pas les abus par peur de représailles ou de stigmatisation. Les femmes et les filles constituent la majorité des victimes (84%), mais les hommes et les garçons sont également touchés, particulièrement dans les centres de détention.
La République Démocratique du Congo, le Soudan du Sud, la République centrafricaine et la région du Sahel figurent parmi les zones les plus affectées. Dans ces régions, les violences sexuelles s’inscrivent dans des stratégies délibérées visant à terroriser les populations civiles, à détruire le tissu social et à déplacer des communautés entières.

Impunité persistante et défaillances institutionnelles
L’impunité reste l’un des principaux obstacles à l’éradication de ces crimes. Moins de 5% des auteurs présumés de violences sexuelles liées aux conflits font l’objet de poursuites judiciaires. Les systèmes judiciaires, souvent affaiblis par les conflits, manquent de ressources et d’expertise pour traiter ces affaires. Par ailleurs, les lois nationales ne sont pas toujours conformes aux standards internationaux en matière de protection des victimes.
Le rapport souligne également les défaillances institutionnelles qui perpétuent ce cycle de violence : absence de mécanismes de protection efficaces, manque de formation des forces de sécurité, corruption et ingérence politique dans les procédures judiciaires. Ces facteurs contribuent à créer un environnement où les auteurs de violences sexuelles peuvent agir en toute impunité.
Conséquences durables sur les individus et les communautés
Les conséquences des violences sexuelles dépassent largement la sphère individuelle. Au niveau des victimes, les séquelles physiques (blessures, infections sexuellement transmissibles, grossesses non désirées) s’accompagnent de traumatismes psychologiques profonds : dépression, anxiété, stress post-traumatique et idées suicidaires. L’accès aux soins médicaux et psychosociaux reste limité, particulièrement dans les zones rurales et les camps de déplacés.
Au niveau communautaire, les violences sexuelles fragilisent le tissu social, exacerbent les tensions ethniques et compromettent les efforts de réconciliation. Les enfants nés de viols sont souvent stigmatisés et rejetés, perpétuant ainsi le cycle de la violence sur plusieurs générations. L’impact économique est également considérable, les victimes étant souvent dans l’incapacité de poursuivre leurs activités productives.

Initiatives prometteuses et recommandations
Malgré ce tableau sombre, le rapport met en lumière plusieurs initiatives prometteuses. Au Rwanda et en Sierra Leone, des tribunaux spécialisés ont permis d’accélérer le traitement des affaires de violences sexuelles. En Ouganda et au Liberia, des programmes communautaires de sensibilisation ont contribué à réduire la stigmatisation des victimes et à encourager les signalements.
Les experts recommandent une approche holistique, combinant prévention, protection, poursuites judiciaires et réparations. Ils appellent les États africains à renforcer leurs cadres juridiques, à investir dans la formation des forces de sécurité et du personnel judiciaire, et à garantir l’accès des victimes aux services essentiels. La participation des femmes aux processus de paix et aux institutions sécuritaires est également identifiée comme un levier essentiel pour prévenir les violences sexuelles.
La lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits nécessite un engagement politique fort et une mobilisation internationale soutenue. Elle constitue un enjeu majeur pour la stabilité du continent africain et pour la réalisation des Objectifs de développement durable.