Depuis plusieurs semaines, des images de croix blanches alignées dans des champs sud-africains circulent massivement sur les réseaux sociaux, accompagnées de messages alarmistes sur la « persécution » des Afrikaners, minorité blanche du pays. Cette campagne de désinformation, orchestrée par des groupes extrémistes et amplifiée par certains médias étrangers, ravive les tensions raciales et alimente un climat de peur et de suspicion en Afrique du Sud.
L’origine d’un symbole controversé
Les croix blanches, initialement installées dans les années 1990 pour commémorer les victimes de meurtres de fermiers, sont aujourd’hui détournées pour servir un discours victimaire et anxiogène. Des vidéos virales, souvent sorties de leur contexte, prétendent que l’Afrique du Sud serait le théâtre d’un « génocide blanc », alors que les statistiques officielles ne corroborent pas cette thèse.
Les autorités sud-africaines dénoncent une manipulation de l’opinion publique, visant à discréditer le gouvernement et à attiser les divisions communautaires. « Il s’agit d’une instrumentalisation de la mémoire à des fins politiques », explique Sipho Dlamini, sociologue à l’université de Pretoria.
Les ressorts de la désinformation
La propagation de ces fake news repose sur des techniques éprouvées : utilisation d’images chocs, témoignages anonymes, chiffres exagérés et relais par des influenceurs étrangers. Les réseaux sociaux, peu modérés, permettent à ces contenus de toucher un large public, bien au-delà des frontières sud-africaines.
Certains groupes d’extrême droite, notamment en Europe et aux États-Unis, s’emparent de ces récits pour dénoncer la « décadence » de l’Afrique post-apartheid et justifier des discours xénophobes. Cette internationalisation de la désinformation complique la tâche des autorités sud-africaines, qui peinent à rétablir la vérité.
Les conséquences sur la société sud-africaine
La multiplication des messages alarmistes sur la « persécution des Afrikaners » alimente un sentiment d’insécurité et de défiance, en particulier dans les zones rurales. Elle fragilise la cohésion nationale et menace les efforts de réconciliation engagés depuis la fin de l’apartheid.
Les associations de défense des droits humains appellent à la vigilance et à la responsabilité des médias, soulignant que la réalité sud-africaine est bien plus complexe que ne le laissent entendre les campagnes de désinformation. Les violences rurales, qui touchent toutes les communautés, sont souvent liées à la criminalité et aux inégalités structurelles, plutôt qu’à une volonté d’extermination ciblée.
Analyse : la bataille de la mémoire et de l’information
L’affaire des croix blanches illustre les dangers de la manipulation de la mémoire collective à des fins politiques. Elle rappelle l’importance d’un travail rigoureux de vérification des faits et d’éducation aux médias, pour éviter que les peurs irrationnelles ne dictent l’agenda public.
Les autorités sud-africaines, appuyées par la société civile, doivent redoubler d’efforts pour combattre la désinformation et promouvoir un récit national inclusif, fondé sur la vérité et la justice.
Conclusion
La polémique autour des croix blanches en Afrique du Sud est un révélateur des tensions persistantes et des défis posés par la désinformation à l’ère numérique. Seule une mobilisation collective permettra de préserver la cohésion sociale et de construire une mémoire partagée, à l’abri des manipulations et des fake news.