JOHANNESBURG, Afrique du Sud – Après deux années de pressions inflationnistes intenses, l’Afrique connaît enfin une accalmie sur le front des prix en 2025. Selon les dernières données de la Banque africaine de développement, le taux d’inflation moyen du continent devrait s’établir à 12,6% cette année, en nette baisse par rapport aux 18,6% enregistrés en 20241.
Une tendance générale à la baisse
Cette décélération de l’inflation s’observe dans la majorité des pays africains, mais avec des disparités importantes. « Les politiques monétaires plus strictes adoptées par de nombreuses banques centrales africaines commencent à porter leurs fruits », explique Lesetja Kganyago, gouverneur de la Banque centrale sud-africaine.
Parmi les pays ayant réussi à maîtriser leur inflation, on peut citer :
- Le Ghana, qui a vu son taux d’inflation passer de plus de 50% en 2023 à environ 15% en 2025
- Le Nigeria, où l’inflation est revenue sous la barre des 20% après avoir frôlé les 30% en 2024
- Le Kenya, qui a réussi à ramener son inflation autour de 6,5% en 20252
Des poches de résistance
Malgré cette tendance générale, certains pays continuent de faire face à une inflation élevée, notamment en raison de dépréciations monétaires importantes. C’est le cas de l’Égypte, de l’Éthiopie et du Zimbabwe, où les taux d’inflation restent à deux chiffres6.
« L’inflation des denrées alimentaires demeure particulièrement persistante dans de nombreuses économies en développement », souligne le rapport des Nations Unies sur la situation et les perspectives de l’économie mondiale 20253. Cette situation exacerbe l’insécurité alimentaire des populations les plus vulnérables.
Les causes de la désinflation
Plusieurs facteurs expliquent cette tendance à la baisse de l’inflation :
- La normalisation des chaînes d’approvisionnement mondiales
- La stabilisation relative des prix des matières premières, notamment énergétiques
- Les politiques monétaires restrictives adoptées par la plupart des banques centrales africaines
- L’amélioration des récoltes dans certaines régions, après plusieurs années de sécheresse
Impact sur les économies africaines
La baisse de l’inflation a des répercussions positives sur les économies du continent :
- Amélioration du pouvoir d’achat des ménages
- Réduction des coûts de production pour les entreprises
- Stabilisation des taux de change pour de nombreuses monnaies africaines
- Possibilité pour certaines banques centrales d’assouplir leur politique monétaire, favorisant ainsi l’investissement et la consommation
« La maîtrise de l’inflation est une condition nécessaire, mais non suffisante, pour une croissance économique durable », rappelle Ngozi Okonjo-Iweala, directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce.
Des défis persistants
Malgré ces progrès, plusieurs défis demeurent :
- La volatilité des prix alimentaires : Les aléas climatiques continuent d’affecter la production agricole dans de nombreuses régions.
- La dépendance aux importations : De nombreux pays africains restent vulnérables aux fluctuations des prix mondiaux des denrées alimentaires et des produits manufacturés.
- Les pressions budgétaires : La lutte contre l’inflation a un coût, notamment en termes de subventions et de soutien aux populations vulnérables.
- Les risques géopolitiques : Les tensions internationales peuvent rapidement se traduire par des chocs inflationnistes, comme l’a montré la guerre en Ukraine.
Perspectives pour 2026
Les projections pour 2026 tablent sur une poursuite de la désinflation, avec un taux moyen continental qui pourrait descendre sous la barre des 10%1. Cependant, ces prévisions restent soumises à de nombreuses incertitudes.
« La vigilance reste de mise », prévient Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique du FMI. « Les banques centrales africaines devront maintenir un équilibre délicat entre la maîtrise de l’inflation et le soutien à la croissance économique. »
Alors que l’Afrique s’efforce de réaliser ses objectifs de développement durable, la maîtrise de l’inflation apparaît comme un enjeu crucial. De sa réussite dépendra en grande partie la capacité du continent à attirer les investissements nécessaires à sa transformation structurelle et à l’amélioration des conditions de vie de ses populations.