Introduction
En mai 2025, l’Angola a pris la décision stratégique de suspendre les importations de farine de blé. Cette mesure, qui s’inscrit dans une volonté de renforcer la souveraineté alimentaire du pays, suscite de nombreux débats parmi les acteurs économiques, les agriculteurs, les industriels et les consommateurs. Entre ambitions de relance agricole, impératifs de sécurité alimentaire et contraintes du marché mondial, l’Angola tente de trouver un équilibre délicat.
Les raisons d’une suspension : contexte et objectifs
Soutenir la production locale
La principale motivation du gouvernement angolais est de stimuler la production nationale de blé et de ses dérivés. En limitant les importations, l’État espère encourager les agriculteurs à investir dans la culture du blé, réduire la dépendance vis-à-vis de l’étranger et créer de la valeur ajoutée localement.
Réduire la facture d’importation
La flambée des prix mondiaux du blé, aggravée par les conflits en Ukraine et les perturbations logistiques, a fortement alourdi la facture d’importation du pays. En 2024, l’Angola a dépensé plus de 400 millions de dollars pour importer de la farine de blé, un coût jugé insoutenable dans un contexte de pression sur les réserves de change.
Les défis de la souveraineté alimentaire

Capacités de production et infrastructures
Si la volonté politique est forte, la filière blé angolaise reste fragile. Les surfaces cultivées sont encore limitées, les rendements faibles et les infrastructures de stockage et de transformation insuffisantes. Les agriculteurs manquent d’accès au crédit, aux semences améliorées et à la formation technique, ce qui freine la montée en puissance du secteur.
Risque de hausse des prix pour les consommateurs
La suspension des importations pourrait entraîner une augmentation des prix du pain et des produits dérivés, affectant le pouvoir d’achat des ménages, notamment les plus modestes. Le gouvernement promet des mesures d’accompagnement, mais la transition s’annonce délicate à court terme.
Impacts sur l’industrie et l’emploi
Relocalisation de la chaîne de valeur
Cette politique de substitution aux importations pourrait favoriser l’émergence d’une industrie locale de la meunerie et de la boulangerie, créant des emplois et dynamisant les économies rurales. Toutefois, la réussite dépendra de la capacité à moderniser les outils de production et à garantir la qualité des produits finis.
Risques de perturbation pour les industriels
Certains industriels, habitués à travailler avec de la farine importée, redoutent des ruptures d’approvisionnement et une baisse de la compétitivité. Ils plaident pour une mise en œuvre progressive et un accompagnement technique accru.
Enjeux géopolitiques et commerciaux

Diversification des partenaires
L’Angola cherche à diversifier ses sources d’approvisionnement en matières premières agricoles, en nouant des partenariats avec d’autres pays africains et en investissant dans la recherche agronomique. Cette stratégie vise à sécuriser l’approvisionnement tout en développant l’expertise locale.
Intégration régionale
La suspension des importations pourrait aussi renforcer les liens avec les pays membres de la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), en favorisant les échanges intra-régionaux et la complémentarité des filières agricoles.
Conclusion
La suspension des importations de farine de blé en Angola est un pari audacieux sur l’avenir. Si elle réussit, elle pourrait transformer la filière agricole nationale et renforcer la sécurité alimentaire du pays. Mais le chemin est semé d’embûches : il faudra investir massivement, accompagner les acteurs locaux et protéger les consommateurs pour éviter que cette ambition ne se retourne contre les plus vulnérables.