Depuis plusieurs années, le Sahel est le théâtre d’une guerre asymétrique menée par des groupes djihadistes affiliés à Al-Qaïda (JNIM) ou à l’État islamique (EIGS). Si ces groupes bénéficiaient autrefois d’un soutien logistique extérieur, une tendance nouvelle se dessine : l’armement local. Cette évolution complique la tâche des forces de sécurité et impose une adaptation des stratégies de lutte.
L’essor de la fabrication locale d’armes
Face à la pression militaire accrue et à la surveillance internationale, les groupes armés du Sahel ont développé des réseaux de fabrication artisanale d’armes, d’explosifs et de drones. Ils recyclent des armes saisies lors d’attaques contre les armées nationales, utilisent des pièces détachées venues du marché noir, et exploitent les compétences locales en mécanique et électronique.
Des ateliers clandestins, parfois mobiles, produisent des engins explosifs improvisés (EEI), des mortiers et des armes légères. Cette capacité d’innovation rend les groupes plus autonomes et imprévisibles, tout en réduisant leur dépendance aux filières extérieures.
Conséquences pour la sécurité régionale
L’armement local permet aux groupes djihadistes de mener des attaques plus fréquentes et plus meurtrières, notamment contre les postes militaires isolés et les convois humanitaires. Les forces de sécurité, déjà sur la défensive, peinent à anticiper les nouvelles menaces et à protéger les populations civiles.
Le développement de drones artisanaux, utilisés pour la surveillance ou l’attaque, marque un tournant dans la guerre au Sahel. Ces technologies, bien que rudimentaires, offrent un avantage tactique aux groupes armés et compliquent la riposte des armées nationales.

Réponse des États et des partenaires internationaux
Pour contrer cette nouvelle donne, les États du Sahel et leurs partenaires internationaux investissent dans la formation, le renseignement et l’innovation technologique. Des unités spécialisées sont créées pour détecter et neutraliser les ateliers clandestins, démanteler les réseaux de trafic et renforcer la surveillance des frontières.
La coopération régionale, à travers le G5 Sahel et l’Initiative d’Accra, est renforcée pour mutualiser les moyens et partager les informations. Toutefois, la faiblesse des institutions, la corruption et le manque de moyens freinent l’efficacité de ces stratégies.
Vers une nouvelle approche de la lutte anti-djihadiste
Au-delà de la réponse militaire, il est impératif d’agir sur les causes profondes de la radicalisation : pauvreté, injustice sociale, marginalisation des jeunes et absence de perspectives économiques. L’implication des communautés locales, la promotion du dialogue interreligieux et le développement de programmes de réinsertion sont essentiels pour briser le cycle de la violence.
La lutte contre l’armement local des groupes djihadistes doit s’inscrire dans une stratégie globale, associant sécurité, développement et gouvernance. Seule une approche intégrée permettra de restaurer la paix et la stabilité au Sahel.