L’échéance présidentielle de 2025 au Cameroun s’annonce déjà historique, non seulement pour le choix des personnalités en lice mais aussi pour l’intensité des contestations juridiques qui secouent le processus. Début août, le Conseil constitutionnel, ultime arbitre de la régularité des élections nationales, a été saisi de 35 recours déposés par des candidats recalés. Très attendue par la société camerounaise et la communauté internationale, l’issue de ces audiences pourrait recadrer durablement la perception du respect de la démocratie au Cameroun.
Un record de recours, reflet d’une fièvre démocratique
Jamais une présidentielle camerounaise n’avait vu un tel volume de contentieux. Parmi les candidats écartés, des figures de premier rang, dont l’opposant Maurice Kamto, dénoncent l’opacité et l’arbitraire qui, selon eux, ont entaché le filtrage initial mené par ELECAM (Elections Cameroon). Les griefs sont variés : dossiers incomplets, incohérences procédurales, choix sélectifs d’interprétation du code électoral. Cette multiplication des protestations traduit, pour nombre d’analystes, un double phénomène : la vitalité croissante d’un pluralisme politique et la méfiance structurelle envers les institutions en place.
Le Conseil constitutionnel sous pression
La responsabilité du Conseil constitutionnel n’a jamais été aussi forte. Chargé d’examiner les recours en audition publique, il se trouve face à un double impératif : donner des garanties de rigueur et d’indépendance, tout en préservant la stabilité politique du pays. Sa composition demeure cependant controversée. Plusieurs membres sont d’anciens proches du président Paul Biya, soit un soupçon de partialité qui alimente la défiance des opposants comme de la société civile. Les audiences sont suivies de près par de nombreux citoyens, organismes d’observation internationale et organisations de défense des droits humains, conscients de l’effet domino que pourraient avoir des décisions mal perçues sur la paix sociale.

Un enjeu de crédibilité démocratique
La question n’est pas que juridique : elle est politique, éthique, existentielle. Pour de nombreux Camerounais, voir leurs candidats prendre place équitablement dans l’arène électorale est la condition minimale d’un scrutin légitime. Selon les observateurs, la gestion rigoureuse et transparente de ces recours électoraux camerounais constituerait un signal fort, notamment après la crise post-électorale de 2018 qui avait fait vaciller la confiance dans la démocratie camerounaise.
La gravité de l’étape actuelle s’explique aussi par le contexte régional : l’Afrique centrale est échaudée par des élections contestées et des transitions politiques difficiles, du Gabon à la RCA en passant par le Tchad. Pour le Cameroun, éviter le cycle suspicion–méfiance–violence relève donc non seulement du respect des normes démocratiques, mais de la préservation de l’ordre public et de l’image internationale du pays.
La société civile en vigilance
Face à l’incertitude, les organisations citoyennes multiplient les appels à la mobilisation pacifique et à une veille constante sur la conduite de la justice électorale camerounaise. De petits mouvements de rue ont été constatés dans plusieurs villes, souvent encadrés par les forces de sécurité pour éviter tout débordement. Quant à ELECAM, elle se défend en arguant du respect des procédures légales, mais peine à convaincre totalement l’opinion.