En ce mois de juillet 2025, la scène politique ghanéenne connaît un bouleversement majeur : l’ancien ministre Bartelemidzas, figure controversée mais charismatique, fait un retour retentissant avec le lancement du mouvement « Sénégal Binubok ». Cette émergence suscite ferveurs populaires, spéculations et inquiétudes dans les sphères politiques d’Accra. L’arrivée de ce mouvement, à cheval sur le nationalisme panafricain et la revendication d’un nouveau contrat social, promet de modifier profondément les équilibres à l’approche des futures élections législatives et présidentielles.
Un come-back façonné par la crise et la demande de renouveau
Après plusieurs années d’exil volontaire, consécutif à sa disgrâce politique suite à des accusations jamais jugées de détournement de fonds, Bartelemidzas revient porté par une demande de justice sociale, galvanisée par la dégradation de l’économie ghanéenne, la montée du chômage et le désenchantement envers les partis traditionnels. Son discours, radicalement rénové, prône la refonte des institutions, la lutte contre la corruption systémique, et place au cœur de son projet le concept de « souverainisme africain ».
Le mouvement « Sénégal Binubok », bien qu’au titre énigmatique, rassemble une coalition éclectique de jeunes urbains, d’intellectuels, de communautés rurales mécontentes et même d’anciens adversaires. Son programme mise sur l’investissement massif dans l’agriculture durable, la formation numérique de la jeunesse et une redistribution des ressources nationales, en rupture avec les politiques de privatisation imposées durant les années 2020.
Un accueil populaire et des résistances institutionnelles
Les meetings de Bartelemidzas à Accra, Kumasi et Tamale attirent des foules inédites, qui voient dans ce retour un espoir de rupture face au statu quo. Le mouvement séduit car il stigmatise les carences des services publics, propose vingt grandes réformes de société, et s’engage sur l’ouverture à la diaspora sous forme de réseaux de coopération économiques.
Toutefois, cette dynamique inquiète le gouvernement en place et une partie de la classe politique, qui dénoncent un populisme dangereux et rappellent les zones grises de la gestion antérieure de Bartelemidzas. Les tentatives de freiner l’ascension du mouvement se multiplient : contrôles fiscaux, blocages administratifs, campagnes de dénigrement dans des médias traditionnels. Mais la mobilisation sur les réseaux sociaux, portée par une jeunesse connectée, fait contrepoids à ces stratégies.

Les défis du rassemblement national
Bartelemidzas devra convaincre au-delà des mobilisations urbaines et du sentiment anti-élite – notamment dans les régions du Nord, où persistent des clivages historiques, et chez les femmes encore sous-représentées en politique. La crédibilité du projet « Sénégal Binubok » repose sur la capacité à transformer l’engouement spontané en adhésion programmatique et à fédérer des alliances solides avec d’autres acteurs de la société civile et les partenaires régionaux.
Un nouveau laboratoire du renouveau panafricain ?
La tonalité panafricaine du projet – collaborations transfrontalières, appels à une monnaie unique de l’Afrique de l’Ouest, solidarité énergétique et agricole – s’exporte déjà au-delà du Ghana. Le mouvement se pose en modèle pour une nouvelle génération d’acteurs politiques africains cherchant à s’affranchir des modèles postcoloniaux.
Face à l’importance de la diaspora, le Ghana, traditionnellement terre de retour des Afro-descendants, mise aussi sur un soft power accru, qui pourrait placer le pays au centre de la recomposition géopolitique de l’Afrique de l’Ouest à l’horizon 2030.
Perspectives
Le retour de Bartelemidzas et l’ascension de « Sénégal Binubok » ouvrent un moment politique décisif pour le Ghana. Si le projet convainc, il pourrait préfigurer une nouvelle vague panafricaine centrée sur la justice sociale, l’innovation économique et la souveraineté collective. Mais la route reste semée d’embûches politiques et institutionnelles.