Introduction : Un pas clé vers la paix au Mali
Le 23 juillet 2025 marque une étape cruciale dans le processus de réconciliation au Mali. Après des années de conflits et d’instabilité, un comité pluraliste a remis au président de transition, le colonel Assimi Goïta, un document central : le projet de charte nationale pour la paix et la réconciliation. Attendue par toute la société malienne, cette charte est le fruit de longs mois de concertation, mêlant acteurs politiques, leaders religieux, chefferies traditionnelles, société civile, mais aussi représentants des régions du Nord et du Centre, longtemps les plus affectées par l’insécurité. Dans un contexte de pression internationale et d’attente populaire forte, cette remise marque-t-elle l’aube d’un Mali pacifié ?
Des origines de la charte : écouter tous les Maliens
Fruit des recommandations du « Dialogue National Inclusif » et des consultations de Bamako à Tombouctou en passant par Mopti, la charte entend aller au-delà du simple vœu pieux. Elle ambitionne de bâtir un socle solide pour restaurer la confiance, poser les jalons d’une justice transitionnelle, et proposer une feuille de route claire pour le retour à l’ordre constitutionnel.
Le Mali, plongé dans le chaos depuis le coup d’État de 2012 puis les insurrections djihadistes et communautaires, a vu son tissu social profondément fracturé. La charte de la paix veut donc répondre autant à la soif d’inclusion politique qu’à la nécessité d’une justice pour les victimes des violences passées.
Quelles mesures clés ? Désarmement, justice et réformes
Selon des extraits partagés par des membres du comité de pilotage, la charte insiste sur :
- Le désarmement et la réinsertion des groupes armés, pour tarir la source des milices locales encore actives.
- L’engagement pour une justice transitionnelle, notamment avec la création de commissions régionales pour examiner les crimes commis depuis 2012.
- Un focus sur le dialogue intercommunautaire, avec la relance de forums de dialogue pour prévenir la propagation des tensions ethniques.
- L’inclusion des femmes, des jeunes et des minorités dans les prochains gouvernements et les futurs processus électoraux.
- La décentralisation de l’État, dont la promesse principale est de rendre plus efficace l’accès aux services publics dans toutes les régions, particulièrement dans le Nord et le Centre.
Le texte, d’environ 40 pages, est présenté comme « une œuvre collective, mais un défi de chaque instant », selon la présidence.
Réactions à chaud : espoir et scepticisme
Dans la rue, la remise de la charte suscite un mélange d’enthousiasme et de prudence.
Fatoumata, leader associative à Ségou, témoigne : « Nous voulons la paix, mais il faut agir vite. Tant que ceux qui portent les armes ne déposent pas leurs kalachnikovs, nous reste en danger. »
Au sein de la société civile de Bamako, on loue « la vitalité du dialogue malien », tout en rappelant le besoin d’actes concrets. Certains leaders communautaires, notamment dans le Delta du Niger, réclament également un plan d’urgence humanitaire, alors que les déplacés internes dépassent aujourd’hui les 750 000 personnes (OIM 2025).

Pression régionale et internationale
L’adoption et la mise en œuvre rapide de cette charte sont surveillées de près par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui conditionne la levée de certaines sanctions à des progrès vérifiables sur la voie du retour à l’ordre constitutionnel. L’Union africaine, l’ONU et la France – partenaire de longue date et récemment en retrait militaire – signalent aussi l’urgence d’avancées politiques tangibles.
Sous la pression de la communauté internationale, le président Goïta s’est déclaré prêt à soumettre le texte à validation devant le Conseil national de transition, et à lancer dès août 2025 un calendrier détaillé pour la réintégration des ex-combattants et l’organisation d’élections transparentes.
Les défis à venir : de la charte au terrain
Si la remise de la charte suscite l’espoir – et permet d’afficher sur la scène africaine la capacité du Mali à parler d’une seule voix – le chantier reste colossal. Au-delà de la signature, tout dépendra de l’application réelle des mesures et de la capacité à instaurer la confiance, notamment auprès des communautés rurales et des régions périphériques, souvent sceptiques face à la parole de l’État. Le maintien de la paix passera inévitablement par des investissements massifs dans la sécurité, la reconstruction et l’emploi des jeunes.
Conclusion
La remise de la charte nationale pour la paix au Mali symbolise un moment de bascule : le retour possible d’un pays sur la voie de la stabilité après une décennie de turbulences. Mais l’histoire malienne a appris la prudence : seule l’application effective, sur le terrain et dans la durée, de ces engagements permettra de transformer l’espoir en réalité.