Le secteur de la construction au Sénégal traverse une crise profonde et prolongée, caractérisée par une chute significative de la consommation de ciment, l’arrêt des chantiers et une augmentation du chômage dans la filière. Cette situation compromettante menace non seulement la santé économique du pays mais aussi la stabilité sociale, appelant à des mesures urgentes et structurantes.
Contexte
Au Sénégal, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) constitue un pilier économique majeur, représentant près de 4% du PIB et employant directement plus de 200 000 personnes. Depuis mi-2024, la filière est en souffrance, avec la suspension prolongée de plusieurs chantiers publics et privés à cause notamment de problèmes financiers liés à des dettes impayées et au gel des investissements. Cette crise entraîne une cascade d’effets néfastes sur la chaîne économique associée, des cimenteries aux fournisseurs, des sous-traitants aux transporteurs.
Développement
La consommation nationale de ciment, indicateur clé du secteur, a chuté de 25% entre août 2023 et août 2024, traduisant la récession aiguë du secteur. Des entreprises locales, pourtant autrefois prospères, se retrouvent en situation critique avec des salaires impayés, des licenciements massifs et une trésorerie exsangue. Pour certains, la fermeture des banques et la perte de confiance des investisseurs aggravent la situation, multipliant les risques d’effondrement.
Le gouvernement a tenté de répondre en votant fin juin 2025 une loi de finances rectificative allouant 105 milliards FCFA (environ 160 millions d’euros) au secteur, mais cette aide est jugée largement insuffisante par les principaux acteurs, comparée aux dettes cumulées qui dépassent les 650 milliards FCFA. De plus, la lenteur dans la mise à disposition des fonds retarde la relance des activités. Le patronat et le syndicat du BTP dénoncent une « hémorragie silencieuse » du secteur.
Conséquences économiques et sociales
La crise du BTP ne s’arrête pas à la construction : elle impacte lourdement toute l’économie sénégalaise. Les emplois directs sont menacés, mais aussi les activités liées comme la fabrication de matériaux, les services logistiques, et les industries connexes. Cette morosité économique pèse sur la demande intérieure, la consommation, et freine la croissance nationale.
Socialement, cette crise génère du chômage partiel, des tensions sociales dans les quartiers ouvriers, et une démotivation générale parmi les professionnels du secteur. Les jeunes, particulièrement touchés, voient leurs perspectives d’emploi réduites, risquant de renforcer les phénomènes de précarité et de migration interne.
Perspectives et solutions
Des voix s’élèvent pour réclamer urgemment un audit transparent, la restructuration des dettes des entreprises, et des mécanismes d’appui à la trésorerie pour permettre la reprise des chantiers. Le gouvernement est encouragé à privilégier une approche intégrée, associant relance financière, lutte contre la corruption, simplification administrative et soutien à la formation professionnelle.
Les experts appellent également à une politique volontariste en matière de logement social, pour redynamiser le secteur privé et éviter une hausse des déséquilibres territoriaux.
Conclusion
La crise du BTP au Sénégal est un signal d’alarme fort pour l’économie et la société. La période actuelle est décisive pour engager des réformes et investir dans la modernisation d’un secteur vital. La capacité de l’État et des acteurs privés à coopérer et agir de façon rapide et coordonnée déterminera le redressement et la pérennité économique du pays.