Le Sahel, vaste bande semi-aride qui s’étire de l’Atlantique à la mer Rouge, demeure en 2025 l’un des épicentres mondiaux de l’insécurité et des défis géopolitiques. Malgré les efforts conjugués des États, des organisations régionales et de la communauté internationale, la région fait face à une recomposition des menaces, à la multiplication des acteurs armés et à une crise humanitaire sans précédent. Les enjeux de sécurité ne se limitent plus à la lutte contre le terrorisme : ils touchent désormais la gouvernance, la cohésion sociale, la gestion des ressources et l’avenir même des sociétés sahéliennes.
Une insécurité persistante et fragmentée
Depuis la chute de Kadhafi en 2011, le Sahel a vu se multiplier les groupes armés, djihadistes ou criminels, qui exploitent la porosité des frontières et la faiblesse des États. En 2025, les attaques de groupes affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), à l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) ou à Boko Haram continuent de semer la terreur au Mali, au Burkina Faso, au Niger et au nord du Bénin. Les enlèvements, les assassinats ciblés et les attaques contre les forces de sécurité restent quotidiens, tandis que les populations civiles paient le plus lourd tribut.
La nouveauté de ces dernières années réside dans la fragmentation des groupes armés, l’émergence de milices d’autodéfense communautaires et la diversification des modes d’action. Les conflits intercommunautaires, exacerbés par la compétition pour l’accès à la terre, à l’eau et aux pâturages, alimentent un cycle de violences qui échappe de plus en plus au contrôle des États.
L’échec relatif des réponses militaires et l’urgence de solutions politiques
Les dispositifs sécuritaires régionaux, tels que le G5 Sahel ou la Force conjointe, peinent à s’imposer durablement sur le terrain. Les opérations militaires, souvent appuyées par la France, les États-Unis ou l’Union européenne, ont certes permis d’éliminer certains chefs terroristes, mais n’ont pas réussi à enrayer la dynamique de la violence. L’annonce progressive du retrait des forces occidentales, notamment françaises, laisse un vide que peinent à combler les armées nationales, souvent sous-équipées et confrontées à des crises internes.
Face à cette impasse, de plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer une approche globale, intégrant la gouvernance, la justice, l’éducation et le développement local. La lutte contre la corruption, la restauration de la confiance entre l’État et les citoyens, et la promotion de la réconciliation nationale apparaissent comme des conditions sine qua non d’une sortie durable de crise.
Crise humanitaire et déplacement des populations
L’insécurité chronique a provoqué des déplacements massifs de populations : plus de 5 millions de personnes sont aujourd’hui déplacées internes ou réfugiées dans la région. Les systèmes de santé et d’éducation sont à l’agonie dans de nombreuses zones rurales, et l’accès à l’eau potable ou à l’alimentation de base devient un défi quotidien. Les ONG et les agences onusiennes tirent la sonnette d’alarme sur le risque d’effondrement social, alors que les financements humanitaires peinent à suivre l’ampleur des besoins.
Le rôle ambigu des puissances étrangères et des nouveaux acteurs
La compétition géopolitique s’intensifie au Sahel, où la Russie, la Turquie, la Chine et les pays du Golfe cherchent à renforcer leur influence, souvent au détriment de la cohérence des stratégies régionales. L’arrivée de sociétés militaires privées, comme le groupe Wagner, bouleverse les équilibres et suscite de vives inquiétudes sur le respect des droits humains et la souveraineté des États.
Perspectives et scénarios pour l’avenir
L’avenir du Sahel dépendra de la capacité des États à restaurer leur légitimité, à offrir des perspectives à leur jeunesse et à inventer de nouveaux modèles de gouvernance. La coopération régionale, la mobilisation des sociétés civiles et l’innovation sociale seront déterminantes pour sortir de l’impasse sécuritaire. En 2025, le Sahel reste le miroir des défis africains : une région à la croisée des chemins, où se joue une partie décisive pour la paix et la stabilité du continent.