Introduction
Le Nigeria, première puissance démographique et économique d’Afrique, demeure confronté à un défi sécuritaire majeur : l’insurrection jihadiste menée par Boko Haram et par sa faction dissidente, l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Plus de 15 ans après le déclenchement de cette guerre asymétrique dans le nord-est du pays, les violences persistent, malgré les efforts colossaux militaro-politiques déployés par Abuja. Loin d’être un conflit isolé, cette crise fragilise la stabilité du Nigeria et, par ricochet, celle de toute l’Afrique de l’Ouest.
Une guerre qui dure depuis 2009
Fondé à Maiduguri en 2002, Boko Haram s’est radicalisé à partir de 2009, se lançant dans une insurrection longue et meurtrière. Depuis, le groupe est responsable de plus de 35 000 morts et de déplacements massifs (au moins 2,5 millions de personnes selon l’ONU). L’ISWAP, issu d’une scission interne en 2016, a donné un nouveau souffle à l’insurrection, élargissant sa portée régionale vers le Tchad, le Cameroun et le Niger.
Les zones rurales du Borno, Adamawa et Yobe restent les plus durement touchées. Les attaques constants — enlèvements, embuscades, pillages — sapent les efforts de stabilisation initiés par le gouvernement fédéral et les forces locales.
L’armée nigériane sur tous les fronts
Le Nigeria a mobilisé d’importants effectifs militaires, appuyés par les voisins membres de la Force multinationale mixte (FMM). Si certaines victoires tactiques ont été obtenues (comme la reprise de territoires anciennement détenus par Boko Haram), l’insurrection ne faiblit pas.
Les problèmes majeurs résident dans :
- la mobilité des insurgés, capables de frapper puis de se replier dans des zones reculées, voire au-delà des frontières ;
- la corruption et le manque de ressources dans l’armée, minant son efficacité ;
- la coopération régionale insuffisante, malgré des initiatives conjointes.
L’impact humanitaire et économique
La crise du nord du Nigeria est aussi humanitaire : familles déplacées, camps de réfugiés saturés, enfants privés d’école. Les enlèvements de masse, comme ceux de Chibok en 2014 (200 lycéennes kidnappées), continuent, devenant une arme psychologique et de financement.
Économiquement, la violence bloque le potentiel agricole du nord-est, accentue l’insécurité alimentaire et condamne des millions de Nigérians à la précarité. Le déficit de confiance entre population et forces armées complique également toute stratégie de pacification.
Une menace régionale persistante
La guerre contre Boko Haram dépasse le cadre nigérian. Elle met directement à l’épreuve la stabilité régionale du bassin du lac Tchad, déjà fragilisé par la pauvreté et les rivalités politiques. De fait, sans une stratégie coordonnée régionale, cette menace continuera d’alimenter un cycle de violences transfrontalières.
Conclusion
Face à Boko Haram et l’ISWAP, le Nigeria doit combiner approche militaire, développement socio-économique et coopération régionale. Tant que la pauvreté, l’exclusion et la corruption alimenteront le désespoir dans le nord-est, la victoire contre l’extrémisme restera incomplète.