Introduction
À Bamako, les autorités de transition viennent d’annoncer officiellement que les élections présidentielle et législatives, initialement prévues pour 2024 puis repoussées à 2025, n’auront finalement pas lieu avant le premier semestre 2026. La junte militaire invoque des «raisons sécuritaires et logistiques», mais cette nouvelle prolongation provoque une vive inquiétude au sein de la classe politique malienne et chez les partenaires régionaux.
Un processus de transition sans cesse reporté
Depuis le coup d’État militaire d’août 2020, suivi par une seconde intervention militaire en mai 2021, le Mali vit sous le contrôle du colonel Assimi Goïta et de son Conseil national de transition. Si les autorités avaient initialement promis un retour rapide à l’ordre constitutionnel, les échéances ont été régulièrement repoussées au gré de la situation sécuritaire jugée «instable». Aujourd’hui, Bamako justifie encore un délai supplémentaire par «l’impossibilité d’organiser des scrutins crédibles dans les régions du Centre et du Nord, toujours confrontées aux attaques djihadistes.»
La communauté internationale méfiante
La CEDEAO, qui avait déjà infligé de lourdes sanctions au Mali avant de revenir sur sa position en 2023, appelle désormais à la vigilance. «Nous demandons un calendrier clair et irréversible menant au scrutin de 2026», a déclaré un porte-parole de l’organisation. L’Union africaine a exprimé des «inquiétudes profondes» et Paris, bien que désormais en retrait diplomatique, évoque «une transition à rallonge qui interroge la crédibilité du régime».
Réactions internes
Dans l’opposition malienne, la colère gronde. Plusieurs partis dénoncent «un refus déguisé de rendre le pouvoir aux civils». «Chaque année, le régime trouve une nouvelle excuse pour repousser l’échéance. Nous sommes face à une confiscation organisée du pouvoir», estime l’URD (Union pour la République et la Démocratie). Pour de nombreux Maliens, ce flou entretient un sentiment de lassitude et de méfiance envers la classe politique comme envers les militaires.
Un pays toujours miné par l’insécurité
Sur le terrain, les attaques djihadistes persistent. Dans les régions de Mopti et Gao, les violences contre civils continuent de s’intensifier. Selon l’ONU, plus de 3 000 personnes ont été tuées au Mali au cours des 12 derniers mois, un chiffre en hausse de 25% par rapport à 2023. Le départ des forces françaises (Barkhane) et de la MINUSMA a laissé un vide sécuritaire que l’armée malienne tente de combler avec l’appui de mercenaires russes du groupe Wagner, désormais présents dans plusieurs opérations.
Conclusion
Avec ce nouveau calendrier, la junte malienne parie sur le temps pour consolider son pouvoir, tout en promettant un retour «assuré» à la démocratie en 2026. Mais pour les partenaires régionaux et la société civile, cette promesse reste incertaine. Le Mali continue de naviguer entre pressions internationales, crises sécuritaires et aspirations démocratiques d’une population fatiguée par quatre années d’attente.