l’UE lance 13 projets stratégiques sur les métaux rares – l’Afrique, nouvel eldorado ?

L’Europe à la conquête des métaux rares : un tournant stratégique

Le 4 juin 2025, la Commission européenne a annoncé le lancement de treize projets stratégiques à l’étranger pour sécuriser l’approvisionnement de l’Union européenne en métaux rares. Cette décision, prise dans un contexte de tensions géopolitiques et de transition énergétique accélérée, place l’Afrique au cœur des ambitions européennes. Les métaux rares, essentiels pour les technologies vertes, les batteries, les smartphones et l’industrie de la défense, deviennent l’enjeu d’une nouvelle ruée mondiale, où l’Afrique apparaît comme un partenaire incontournable… mais aussi comme un terrain de rivalités.

Pourquoi les métaux rares sont-ils si stratégiques ?

Les métaux rares (lithium, cobalt, nickel, terres rares, tungstène, etc.) sont indispensables à la fabrication des batteries électriques, des panneaux solaires, des éoliennes et de nombreux composants électroniques. La transition énergétique, la digitalisation de l’économie et la montée des besoins en stockage d’énergie font exploser la demande mondiale. Or, la production est aujourd’hui concentrée dans quelques pays (Chine, République démocratique du Congo, Chili, Australie), exposant l’Europe à des risques de pénurie et de dépendance.

L’Afrique, au centre de toutes les convoitises

Avec ses vastes réserves de cobalt, de lithium, de manganèse ou de terres rares, l’Afrique est courtisée par toutes les grandes puissances. La République démocratique du Congo fournit déjà plus de 60 % du cobalt mondial, le Zimbabwe et le Mali sont riches en lithium, le Maroc en phosphates. L’UE, la Chine, les États-Unis et la Russie multiplient les partenariats, les investissements et les accords pour sécuriser leur accès à ces ressources stratégiques.

Les 13 projets stratégiques de l’UE : une nouvelle ère de coopération ?

La Commission européenne a détaillé treize projets d’extraction, de transformation et de recyclage, dont plusieurs concernent des pays africains : RDC, Namibie, Mozambique, Madagascar, Maroc. L’objectif est de diversifier les sources d’approvisionnement, de renforcer la chaîne de valeur locale et de promouvoir des normes environnementales et sociales élevées. L’UE promet des investissements massifs, des transferts de technologie et des programmes de formation pour accompagner le développement du secteur minier africain.

Les risques d’une nouvelle « ruée vers l’or » ?

Si les opportunités sont immenses, les risques le sont tout autant. L’histoire récente a montré que l’exploitation minière peut entraîner des conflits, des déplacements de populations, des pollutions et des violations des droits humains. Les ONG mettent en garde contre le « néocolonialisme vert », où les ressources africaines seraient extraites sans bénéfices réels pour les populations locales. La question de la gouvernance, de la transparence et de la redistribution des richesses est centrale pour éviter les erreurs du passé.

Carester présente son projet industriel de recyclage de terres rares. En présence d’Agnès pannier-Runacher, ministre de la transition écologique et Laurent Saint Martin Ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères

Les attentes des pays africains

Les gouvernements africains veulent tirer parti de la demande mondiale pour négocier de meilleurs contrats, développer la transformation locale et créer des emplois qualifiés. Plusieurs pays, comme la RDC ou le Ghana, imposent désormais des quotas de transformation sur place, interdisent l’exportation de minerais bruts ou négocient des partenariats industriels. L’Union africaine encourage la création de chaînes de valeur régionales, la mutualisation des infrastructures et la lutte contre la corruption.

Les enjeux pour la transition énergétique africaine

Au-delà de l’exportation, les métaux rares sont aussi un levier pour la transition énergétique du continent. Les batteries, les panneaux solaires et les réseaux intelligents peuvent permettre à l’Afrique de développer ses propres solutions d’accès à l’énergie, de réduire sa dépendance aux énergies fossiles et de créer des filières industrielles innovantes. La coopération avec l’UE peut être une opportunité, à condition de privilégier des partenariats équilibrés et durables.

Les défis de la gouvernance et de la transparence

La gestion des revenus miniers, la lutte contre la corruption et la protection de l’environnement restent des défis majeurs. La société civile africaine réclame plus de transparence, la publication des contrats, la consultation des communautés locales et le respect des normes internationales. Des initiatives comme l’ITIE (Initiative pour la transparence dans les industries extractives) ou le Pacte mondial sur les minéraux critiques sont soutenues par l’UE, mais leur application reste inégale.

Conclusion : l’Afrique à la croisée des chemins

La nouvelle stratégie européenne sur les métaux rares place l’Afrique au cœur des enjeux du XXIe siècle. Entre opportunités et risques, le continent doit inventer ses propres modèles de développement, renforcer sa gouvernance et défendre ses intérêts. La renaissance africaine passe par la valorisation de ses ressources, mais aussi par la capacité à imposer ses conditions et à transformer ses richesses en prospérité partagée.

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