Le Mali se trouve de nouveau à la croisée des chemins, tiraillé entre la consolidation du pouvoir central et la résurgence des revendications armées dans le nord du pays. Alors que Bamako tente d’affirmer son autorité dans des régions héritières d’un long passé de conflits, l’Algérie, acteur diplomatique de premier plan, s’avance pour proposer une médiation, renouant avec son rôle traditionnel de “faiseur de paix” au Sahel.
Le retour des tensions
Depuis la signature, souvent contestée, de l’Accord d’Alger de 2015, la paix demeure fragile au nord du Mali. La Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et des factions alliées multiplient depuis 2024 les critiques contre le gouvernement central, dénonçant la lenteur des engagements, le non-respect de certains volets de l’accord, ainsi que ce qu’ils perçoivent comme une mainmise progressive de l’armée sur les institutions régionales.
En 2025, la multiplication des affrontements sporadiques entre groupes armés et forces gouvernementales inquiète les populations locales et la communauté diplomatique. Plusieurs villes − Ménaka, Kidal, Gao − font état de déplacements massifs de civils et de tensions ethnico-communautaires.
L’initiative algérienne
Forte de son expérience dans la résolution de la crise malienne qui avait abouti à l’Accord d’Alger, l’Algérie a officiellement proposé une médiation, cherchant à rassembler autour de la table Bamako, la CMA, des groupes signataires et de nouveaux acteurs issus de la société civile du Nord.
Cet engagement vise à éviter une escalade susceptible de déborder les frontières maliennes, de raviver l’instabilité au Niger et au Burkina Faso, et de torpiller les maigres succès militaires enregistrés face aux groupes jihadistes.
Un contexte sous tension
Mais l’intention algérienne, saluée par la communauté internationale et l’Union africaine, ne fait pas l’unanimité. À Bamako, le gouvernement se veut méfiant, préférant un dialogue “interne” et désireux de négocier en position de force. De leur côté, les groupes armés conditionnent leur retour au processus de paix à la garantie d’une autonomie locale accrue et à la démilitarisation partielle du nord.
Certains observateurs redoutent que la démultiplication de médiateurs − Russie, Union africaine, CEDEAO − ne complexifie davantage une scène déjà fragmentée. Mais la voix algérienne, forte de son ancrage historique, conserve une crédibilité régionale.
Enjeux de paix, enjeux de stabilité
Si l’Algérie parvient à imposer sa vision, elle offrirait au Mali l’opportunité de renouer avec un équilibre longtemps cherché : sortie du rapport de force, paix relative permettant la relance économique et la stabilisation des routes commerciales transsahariennes. L’enjeu dépasse donc la sécurité, touchant à l’intégration régionale et à la confiance entre populations riveraines souvent oubliées des grands desseins politiques.
Et maintenant ?
La balle reste dans le camp des parties maliennes. Si la dynamique de médiation aboutit, elle pourrait servir de laboratoire pour d’autres crises sahéliennes. Mais l’échec aggraverait l’instabilité, alimentant un cycle de violences préjudiciable à toute la région.