Depuis son lancement en 2000, l’African Growth and Opportunity Act (AGOA) a symbolisé une étape majeure dans la politique commerciale entre Washington et l’Afrique subsaharienne. En permettant aux pays africains d’exporter des milliers de produits sans droits de douane vers les États-Unis, cet accord a contribué à stimuler des secteurs-clés tels que le textile, l’agroalimentaire et l’artisanat. Mais à l’automne 2025, l’AGOA arrive à sa fin programmée, ouvrant une période d’incertitude pour de nombreuses économies africaines.
Les États-Unis, sous la présidence de Donald Trump, envisagent une refonte profonde de leurs partenariats commerciaux. L’AGOA, jugée obsolète par la nouvelle administration américaine, pourrait être remplacée par des accords bilatéraux individualisés, plus stricts sur les normes de gouvernance et l’ouverture des marchés africains. Cette évolution inquiète les gouvernements africains, qui redoutent une fragmentation de l’accès au marché américain.
Pour de nombreux pays, l’AGOA a été synonyme de croissance à double chiffre dans certains secteurs. Le Kenya, l’Éthiopie et Madagascar ont notamment profité de l’accès préférentiel pour développer leurs exportations textiles. Le Nigeria et le Ghana, eux, ont intégré des produits agricoles et pétrochimiques dans la filière américaine. Mais l’absence d’un mécanisme pérenne risque de fragiliser ces échanges.
Les analystes africains évoquent la nécessité d’une approche continentale. L’Union africaine pourrait saisir l’opportunité de la fin de l’AGOA pour accélérer la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et redéfinir sa relation économique avec Washington. Une voûte économique africaine capable de négocier d’égal à égal.
Derrière la fente des douanes et des chiffres se cache un enjeu politique crucial : celui de la souveraineté. L’Afrique d’aujourd’hui, plus structurée, cherche à rompre le modèle de dépendance commerciale asymétrique. La fin de l’AGOA ne doit pas être perçue comme une perte, mais plutôt comme le commencement d’une nouvelle autonomie économique. Cela exige plus de coordination africaine, des systèmes douaniers harmonisés et surtout une stratégie d’exportation diversifiée visant l’Asie et l’Amérique latine.
À Washington, le débat n’est pas clos. Certains sénateurs républicains plaident pour une prolongation transitoire de cinq ans, le temps de redéfinir les règles. Mais sur le continent africain, le message est clair : l’heure est au repositionnement stratégique.