Introduction
Juillet 2025 : la guerre en Ukraine aborde un nouveau tournant diplomatique, après plus de trois ans de conflit majeur et une stagnation meurtrière sur le front. Alors que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a proposé à la Russie de relancer les pourparlers la semaine prochaine, le Kremlin laisse entrevoir une ouverture conditionnée à la présence de Donald Trump dans le jeu international. Cette déclaration, insolite et hautement stratégique, révèle l’ampleur de la recomposition des médiations et souligne la complexité d’une équation de paix aujourd’hui en suspens. Comment comprendre ce nouveau moment ? Quelles chances pour une négociation sérieuse et quels risques sous-jacents pour l’Europe, l’Afrique et l’ensemble du Sud global ?
Un contexte militaire et politique figé
Depuis l’hiver 2024-2025, le front s’est stabilisé sur une ligne de contact meurtrière, de Kharkiv à Kherson, au prix de pertes civiles et militaires abyssales. La Russie, après avoir consolidé ses gains dans l’Est de l’Ukraine, affronte une résistance ukrainienne résolue, mais épuisée économiquement et matériellement par la longueur du conflit et la fragmentation de l’aide occidentale. Les grandes contre-offensives du printemps ont montré leurs limites : ni l’armée russe ni les forces ukrainiennes ne sont capables d’emporter un avantage décisif sur le terrain.
Politiquement, le régime de Vladimir Poutine fait face à une fatigue de guerre et à des sanctions qui laminent l’économie russe, sans provoquer le renversement attendu par une partie de l’Occident. Côté ukrainien, la mobilisation reste forte mais le moral vacille : l’exode, la destruction des infrastructures et la lassitude internationale pèsent sur la société civile.
Une diplomatie sous condition : le rôle de Trump
C’est dans ce climat d’impasse que la diplomatie ressurgit. Selon le porte-parole du Kremlin, Vladimir Poutine ne rencontrerait Volodymyr Zelensky pour des pourparlers directs que sous la “fenêtre Trump” : la promesse d’une médiation américaine incarnée par l’ex-président ou la perspective de son retour possible au pouvoir. La démarche vise à “casser” le format normand (Kyiv-Berlin-Paris) et marginaliser l’UE, conférant à Washington les clés d’un éventuel compromis.
Cette stratégie fait écho aux dernières négociations, menées de juin à juillet 2025 sous l’égide (en coulisses) du Qatar, de la Turquie et – plus récemment – de l’Afrique du Sud, qui cherche à imposer sa médiation dans le jeu eurasiatique.
Les enjeux pour l’Ukraine et ses alliés
- Risque de division occidentale : L’attentisme américain, lié à la campagne électorale et à l’affaiblissement du consensus atlantique, affaiblit la position de l’Ukraine. L’Europe s’inquiète d’être mise sur la touche, alors qu’elle porte l’essentiel de l’aide humanitaire et l’accueil de six millions de réfugiés.
- Exigences russes : Moscou exige la reconnaissance de ses gains territoriaux, la neutralisation militaire de l’Ukraine et le blocage de toute adhésion à l’OTAN – des lignes rouges inacceptables pour Kiev.
- Jeu des puissances émergentes : La Chine et l’Inde avancent leurs intérêts économiques et énergétiques, jouant la carte du multilatéralisme “non aligné”.
Scénarios possibles de négociation
La fenêtre diplomatique qui s’ouvre repose sur plusieurs variables :
- Un retour américain à la médiation directe, possible si Donald Trump (ou un autre “deal-maker” autoproclamé) accélère sa stratégie de paix ;
- La garantie d’un “cessez-le-feu temporaire” permettant l’accès humanitaire et la reconstruction partielle des infrastructures ;
- L’organisation, dès l’automne, d’une série de pourparlers supervisés par l’ONU ou le G20, avec une implication du Sud global.
Mais les risques d’enlisement restent majeurs : la poursuite des frappes, la volatilité des soutiens, une radicalisation de chaque camp en cas d’échec.
Conséquences pour l’Europe, l’Afrique et le Sud global
Les pays européens, fortement exposés aux conséquences énergétiques et migratoires, redoutent une “paix tronquée” qui banaliserait la violation des frontières. L’Afrique, pour sa part, espère une stabilisation qui faciliterait la reprise des exportations de blé et la chute des prix alimentaires mondiaux, tout en redoutant que l’arbitrage mondial ne lui échappe encore.
La pression des sociétés civiles et des ONG
Si la “grande politique” hésite, la société civile s’organise : appels aux cessez-le-feu, campagnes pour l’aide humanitaire, plaidoyers pour la prise en compte des victimes. Le théâtre ukrainien reste, malgré tout, une guerre de destins humains – ceux dont la vie s’écrit loin des chancelleries.
Conclusion
La possible reprise des négociations Ukraine-Russie illustre la complexité d’un conflit mêlant enjeux nationaux, continentaux et globaux. L’entrée en jeu de Trump, l’affirmation de puissances du Sud et la lassitude des opinions occidentales remettent toute la diplomatie en mouvement, sans garantie de paix réelle. Pour l’Ukraine comme pour ses alliés et les observateurs du Sud global, la prochaine séquence pourrait sceller le visage géopolitique de l’Europe pour la décennie à venir.