Introduction : Un tournant décisif dans la diplomatie américaine en Afrique
Le retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis en 2025 marque une nouvelle phase dans la relation Amérique-Afrique. Historiquement marginalisée et souvent toilettée sous les présidents précédents via l’aide au développement et la diplomatie publique, l’Afrique est désormais abordée par Trump sous un angle résolument stratégique, économique et sécuritaire. Son slogan « Trade, not aid » (Commerce, pas aide) résume cette nouvelle approche : privilégier les échanges commerciaux et l’investissement plutôt que la simple aide financière.
Ce dossier plonge au cœur de la stratégie africaine de Donald Trump, ses implications géopolitiques, ses leviers économiques, ainsi que les diverses lectures politiques sur le continent.
1. Le contexte stratégique : la compétition mondiale pour l’Afrique
En pleine compétition mondiale avec la Chine et la Russie, les États-Unis ont conscience que l’Afrique est devenue un enjeu crucial tant sur le plan économique avec ses richesses (minerais stratégiques, agriculture, énergie), que stratégique (sécurité, influence politique).
- Chine : Premier partenaire commercial de l’Afrique, avec des investissements colossaux et un maillage dense via les nouvelles routes de la soie.
- Russie : Renforce sa présence via la coopération militaire, la sécurité privée (groupes paramilitaires), et une intense campagne informationnelle.
- États-Unis : Avec Trump, réinvente sa diplomatie africaine autour de l’économie, des ressources critiques, et de la sécurisation des alliances.
2. La stratégie Trump : privilégier le commerce et la sécurité
Commerce avant aide
Trump a drastiquement réduit l’aide publique au développement (APD) en Afrique, fermant plusieurs institutions clés comme USAID. À la place, il privilégie des « deals » commerciaux, souvent liés à l’extraction de minerais précieux (lithium, cobalt, uranium), avec pour objectif une « prospérité mutuelle » fondée sur le partenariat économique.
La question énergétique et minière
Des pays comme la République démocratique du Congo et le Niger deviennent des points focaux de cette stratégie, notamment pour leurs richesses en minerais stratégiques nécessaires aux technologies de pointe. La Maison Blanche a clairement exprimé vouloir sécuriser des chaînes d’approvisionnement critiques, limitant ainsi l’influence chinoise dans ces domaines.
La sécurité comme levier
Parallèlement, l’approche américaine insiste sur la sécurité régionale, notamment face aux groupes djihadistes du Sahel. L’AFRICOM, commandement militaire américain en Afrique, continue de jouer un rôle central en coordination avec les pays africains.
3. Les sommets et rencontres symboliques
En juillet 2025, Donald Trump a reçu à la Maison Blanche cinq présidents africains triés sur le volet : Sénégal, Mauritanie, Guinée-Bissau, Gabon, Liberia. Ces rencontres visent à dynamiser les partenariats commerciaux et sécuritaires.
- Ces pays ont été choisis pour leur stabilité relative et leur importance stratégique sur la façade atlantique africaine.
- Le mini-sommet a mis l’accent sur un message clair : l’Afrique est un continent riche, digne partenaire commercial et stratégique.
4. Les critiques et les limites de la politique Trump
Méfiance sur le continent
Plusieurs dirigeants africains et observateurs dénoncent une logique trop « transactionnelle », où les intérêts américains s’imposent souvent aux coûts des dynamiques régionales ou des engagements pour le développement inclusif.
Réduction de la portée multilatérale
Trump tend à privilégier des relations bilatérales personnalisées, abandonnant partiellement les cadres multilatéraux qui avaient facilité la coopération régionale avec l’Union africaine ou la Banque africaine de développement.
5. La question migratoire : un levier de négociation délicat
La gestion des flux migratoires est un sujet central pour les États-Unis sous Trump. Les États africains sont invités à renforcer leurs contrôles en échange de facilités commerciales ou d’assistance.
- Ce mécanisme de marchandage est controversé, car il mélange intérêts sécuritaires américains et souveraineté africaine.
- Les flux migratoires sont aussi une réponse aux inégalités et crises internes dans plusieurs pays africains.
6. L’avenir de la relation Afrique – États-Unis sous Donald Trump
La finalité de la politique africaine américaine sous Trump est d’ancrer durablement les États-Unis comme acteur majeur, capable de rivaliser avec la Chine et la Russie.
- Le sommet États-Unis-Afrique, initialement prévu, a été reporté, mais reste un enjeu central.
- Les innovations autour des technologies numériques, des investissements dans les énergies renouvelables et la formation des jeunes africains représentent aussi un nouveau champ d’opportunités.
Conclusion : Une relation économique et stratégique à réinventer
La stratégie Trump en Afrique opère un changement profond : une transition de la philanthropie à la diplomatie économique et sécuritaire. Si cette approche ouvre des opportunités, elle soulève aussi des interrogations sur les formes de coopération, la place des droits humains, la souveraineté et le développement durable.
L’Afrique, pour sa part, prend conscience de sa valeur géopolitique et cherche à tirer parti de cette compétition mondiale pour consolider son développement et ses ambitions internationales.