Baya Mahieddine (1931-1998), née Fatma Haddad, s’impose en 2025 comme une figure incontournable de l’art moderne grâce à des expositions majeures en France et une reconnaissance posthume de son influence sur des géants comme Picasso. Son univers visuel, marqué par des femmes puissantes et une nature exubérante, redéfinit aujourd’hui les récits postcoloniaux de l’histoire de l’art.
Expositions 2025 : consécration marseillaise
Le musée Cantini de Marseille consacre jusqu’au 20 avril 2025 une rétrospective exceptionnelle de l’artiste algérienne, réunissant 28 œuvres (sculptures, gouaches, céramiques) dont des pièces inédites :
- Acquisitions récentes : La céramique Animal fantastique aux deux femmes (acquise en décembre 2024) dialogue avec des gouaches emblématiques.
- Don anonyme : Une famille a offert des œuvres clés, dont une pièce poignante dédiée à la mère de Baya, décédée lors de son enfance.
- Hommage institutionnel : « Le monde découvre enfin l’apport massif de Baya à l’art moderne », souligne Benoît Payan, maire de Marseille1.
Cette exposition s’inscrit dans un cycle initié par la Vieille Charité (2023) et prolonge la réflexion sur son rôle dans l’émancipation des femmes artistes en contexte colonial2.
Style et symboles : un langage visuel révolutionnaire
Baya crée un univers où se mêlent traditions maghrébines et audace moderne :
Éléments clés | Manifestations dans son œuvre |
Femmes libres | Robes kabyles stylisées, postures dominantes |
Flore et faune | Palmiers, oiseaux, fruits symbolisant abondance |
Couleurs vives | Palette éclatante (rouge sang, bleu électrique) |
Héritage artisanal | Motifs de céramique, bijoux traditionnels intégrés |
Ses gouaches, comme Paysage aux oiseaux (1966), transcendent les frontières entre peinture et sculpture, influençant Picasso dans sa série Les Femmes d’Alger (1955)12.
Parcours : de l’orphelinat algérien aux cimaises parisiennes
Née à Alger, Baya est repérée à 11 ans par Marguerite Caminat, artiste française qui l’initie à la création. Son ascension fulgurante débute en 1947 :
- 1947 : Première exposition solo chez Maeght à Paris, saluée par André Breton.
- 1948 : Collaboration avec Picasso à Vallauris, où elle modèle des céramiques.
- Années 1950-1990 : Retour en Algérie, développement d’un style mêlant contes populaires et critique sociale2.
Postérité : une icône féministe et postcoloniale
Baya incarne désormais une double révolution :
- Féministe : Ses femmes sans visage, archétypes de résistance, inspirent des artistes comme Lydia Ourahmane.
- Décoloniale : Son refus des catégories occidentales (« art naïf », « art primitif ») en fait un symbole de l’autonomie créative algérienne.
L’exposition marseillaise inclut des archives rares (lettres, photos) révélant son réseau d’intellectuels anticoloniaux (Jean Amrouche, Émile Dermenghem)2.