Afrique du Sud, manœuvres pour éviter la guerre commerciale avec les USA

Pretoria –
À l’heure où les tensions commerciales s’intensifient entre les États-Unis et plusieurs grands partenaires mondiaux, l’Afrique du Sud fait face à un défi diplomatique crucial : préserver l’accès de ses exportations aux marchés américains tout en défendant sa souveraineté et ses intérêts économiques. La menace d’une guerre commerciale pourrait avoir de lourdes conséquences sur l’industrie sud-africaine, déjà éprouvée par la crise énergétique, la baisse de la croissance et les turbulences post-pandémiques.

Montée de la tension : l’enjeu du marché AGOA

Au cœur des débats se trouve l’accord African Growth and Opportunity Act (AGOA), qui permet à plus de 6 500 produits africains, dont ceux d’Afrique du Sud, d’entrer sur le marché américain sans droits de douane. Depuis 2024, certains parlementaires américains militent pour exclure l’Afrique du Sud de l’AGOA, accusant le pays de s’éloigner de certains principes de politique étrangère occidentale, notamment sur la guerre en Ukraine et sa coopération stratégique avec la Chine et la Russie.
Le secteur automobile, l’agroalimentaire, les vins et les fruits sud-africains sont particulièrement exposés : 20% des exportations de voitures sud-africaines sont destinées aux États-Unis, selon le ministère du Commerce.

Stratégies diplomatiques et enjeux nationaux

Sous la houlette du président Cyril Ramaphosa, Pretoria multiplie les démarches : plaidoyers auprès du Congrès, délégations industrielles aux États-Unis, rencontres bilatérales centrées sur la “contribution africaine à la croissance mondiale”.
Pour le ministre des Affaires étrangères, Naledi Pandor :

« L’Afrique du Sud reste engagée dans un commerce mondial ouvert. Nous souhaitons coopérer, non subir des mesures punitives contraires à l’esprit du partenariat. »

Le gouvernement a aussi renforcé le dialogue avec les partenaires africains pour adopter une position collective face aux pressions américaines, soulignant le risque pour l’emploi et la stabilité industrielle de la région entière.

Entre pression politique et réalités industrielles

Au-delà des enjeux géopolitiques, les industriels du Gauteng et du Cap s’inquiètent :

« Toute mesure de rétorsion serait un désastre. L’emploi de milliers de familles dépend des débouchés américains »,, alerte Sipho Dlamini, directeur d’usine à Port Elizabeth.

Certains analystes évoquent la possibilité d’une réorientation forcée vers de nouveaux marchés asiatiques ou européens, ce qui nécessiterait des ajustements majeurs en termes de logistique et conformité.

Impacts indirects : du rand à la confiance des investisseurs

À chaque annonce américaine, le rand subit une volatilité accrue. Les investisseurs étrangers redoutent une instabilité supplémentaire, ce qui ralentit ou reporte certains engagements, notamment dans l’industrie automobile et minière.

Vers une issue négociée ?

Malgré la menace latente d’une exclusion, les experts restent optimistes quant à la capacité de Pretoria à négocier un statu quo, arguant de l’importance stratégique de l’Afrique du Sud pour la stabilité régionale et la chaîne de valeur mondiale.

Conclusion

L’Afrique du Sud joue une partie délicate, tentant d’éviter l’affrontement frontal tout en affirmant ses priorités nationales. Le sort de l’industrie exportatrice dépend du succès de cette diplomatie économique discrète mais déterminée – entre nécessité de compromis et affirmation d’une souveraineté africaine.

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