Introduction
L’année 2025 s’annonce comme un tournant pour les économies africaines. Après une période marquée par la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et les chocs climatiques, la croissance repart à la hausse sur le continent. Selon la Banque africaine de développement (BAD), le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, le PIB réel africain devrait croître de 4,1 à 4,2 % en 2025, confirmant la place de l’Afrique comme deuxième région la plus dynamique au monde, derrière l’Asie1568. Cependant, cette embellie masque des vulnérabilités structurelles et des défis majeurs, notamment en matière de réduction de la pauvreté, de gestion de la dette et de résilience face aux chocs mondiaux.
Les moteurs de la croissance africaine en 2025
Reprise de la consommation et des investissements
La croissance africaine en 2025 est principalement tirée par la reprise de la consommation privée, stimulée par un ralentissement de l’inflation et une amélioration des conditions financières internationales17. La baisse des taux directeurs dans plusieurs pays favorise l’accès au crédit et encourage l’investissement dans l’industrie, l’agriculture et les infrastructures.
Retour des investissements étrangers
L’amélioration du climat macroéconomique attire de nouveau les investisseurs internationaux, notamment dans les secteurs de l’énergie, de la logistique et des nouvelles technologies. Les flux d’investissements directs étrangers (IDE) repartent à la hausse, portés par la stabilité relative des prix et la perspective de rendements attractifs.
Croissance sectorielle et diversification
L’Afrique bénéficie d’une diversification progressive de ses économies. Outre les hydrocarbures et les matières premières, les services, l’agro-industrie, les télécommunications et la finance numérique connaissent une expansion rapide. Les pays comme le Sénégal, le Rwanda, le Niger ou Djibouti devraient dépasser 5 % de croissance du PIB en 2025, selon la BAD, rejoignant ainsi le peloton des économies les plus dynamiques du monde6.
Les défis structurels et les vulnérabilités
Croissance insuffisante pour réduire la pauvreté
Malgré ces progrès, la croissance africaine reste en deçà du seuil de 7 % jugé nécessaire pour une réduction significative de la pauvreté5. Rapportée par habitant, la hausse du PIB réel ne dépasse pas 1,7 %1. La démographie galopante, notamment en Afrique subsaharienne, continue d’exercer une pression sur les services publics, l’emploi et les infrastructures.
Endettement et risques budgétaires
Si la situation de la dette s’améliore dans certains pays, neuf États sont en situation de surendettement et onze autres à haut risque6. Les déficits budgétaires, qui ont atteint 4,6 % du PIB en 2024, devraient se réduire à 4,1 % en 2025, mais restent supérieurs aux niveaux d’avant la pandémie. La soutenabilité de la dette demeure un enjeu central, surtout dans un contexte de volatilité des marchés financiers mondiaux.
Inflation et stabilité monétaire
L’inflation, bien que sur le déclin (de 18,6 % en 2024 à 12,6 % prévue en 2025-2026), reste élevée dans plusieurs économies, notamment en Angola, Égypte, Éthiopie, Ghana, Kenya, Nigeria et Zimbabwe16. Cette situation fragilise le pouvoir d’achat des ménages et complique la gestion macroéconomique.
Chocs exogènes et instabilité politique
L’Afrique reste vulnérable aux chocs externes : fluctuations des cours mondiaux des matières premières, conflits régionaux (Sahel, Corne de l’Afrique), catastrophes climatiques et incertitudes géopolitiques. La croissance de certaines grandes économies (Angola, Nigeria, Afrique du Sud) demeure inférieure à la moyenne régionale, freinant le dynamisme global7.
Les perspectives et leviers de transformation
Intégration régionale et ZLECAf
La mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) est un levier majeur pour stimuler le commerce intra-africain, diversifier les économies et renforcer la résilience face aux chocs extérieurs9. Selon la Commission économique pour l’Afrique, la ZLECAf pourrait accroître le commerce intra-africain de près de 50 % et favoriser l’industrialisation, l’innovation et l’intégration dans les chaînes de valeur mondiales.
Transitions climatique et technologique
La transition vers une économie verte et numérique prend de l’ampleur. L’adoption des énergies renouvelables, la digitalisation des services publics et privés et la montée en puissance des fintechs sont autant de facteurs de transformation structurelle. Ces dynamiques offrent des opportunités pour l’emploi des jeunes et la création de nouveaux marchés.
Réformes et gouvernance
La consolidation des réformes économiques, la lutte contre la corruption, l’amélioration de la gouvernance et l’investissement dans le capital humain restent des priorités. La croissance inclusive et durable dépendra de la capacité des États à mettre en œuvre des politiques cohérentes et à mobiliser les ressources nécessaires pour financer le développement.
Conclusion
L’Afrique aborde 2025 avec une croissance en nette accélération et des perspectives encourageantes. Mais cette dynamique reste fragile et inégale, menacée par des vulnérabilités structurelles, des risques budgétaires et des défis sociaux majeurs. La réussite de l’intégration régionale, la gestion prudente de la dette et l’investissement dans la jeunesse et l’innovation seront déterminants pour transformer la croissance en développement durable et partagé.