Le 16 mai, la Journée internationale du vivre-ensemble en paix, instaurée par les Nations unies, prend une résonance particulière sur le continent africain. L’Afrique, riche de ses diversités culturelles, ethniques et religieuses, est aussi le théâtre de tensions, de conflits et de défis majeurs en matière de cohésion sociale. Pourtant, partout sur le continent, des initiatives émergent pour promouvoir la paix, le dialogue et la tolérance. Cette dynamique, essentielle pour l’avenir, mérite d’être analysée en profondeur.
Un continent à la croisée des chemins
L’Afrique est souvent perçue à travers le prisme de ses conflits : guerres civiles, tensions interethniques, violences religieuses, rivalités politiques. Pourtant, cette vision réductrice occulte la réalité d’un continent en pleine transformation, où la société civile, les institutions et les citoyens s’engagent pour bâtir la paix au quotidien.
La Journée internationale du vivre-ensemble en paix, célébrée chaque 16 mai, offre l’occasion de mettre en lumière ces efforts, mais aussi d’interroger les obstacles persistants à la réconciliation et à la cohésion.
Les racines des tensions
Les conflits africains ont des causes multiples : héritage colonial, compétition pour les ressources, inégalités économiques, faiblesse des institutions, manipulations politiques, fractures identitaires. À cela s’ajoutent les défis contemporains : radicalisation, migrations forcées, impacts du changement climatique, urbanisation rapide.
Dans ce contexte, le vivre-ensemble n’est pas un acquis, mais un objectif à conquérir, chaque jour, dans les quartiers, les villages, les écoles et les institutions.
Initiatives citoyennes et innovations sociales
Face à ces défis, de nombreuses initiatives voient le jour, portées par des ONG, des associations, des leaders communautaires, des artistes ou des entrepreneurs sociaux. À Bamako, un collectif de jeunes organise des ateliers de dialogue interreligieux pour désamorcer les tensions entre communautés musulmanes et chrétiennes. À Kigali, des programmes éducatifs favorisent la mémoire et la réconciliation après le génocide. Au Nigeria, des réseaux de femmes œuvrent pour la médiation dans les zones de conflit.
Les arts jouent aussi un rôle clé : le théâtre-forum, la musique engagée, les festivals interculturels deviennent des espaces de dialogue et de guérison collective. Les réseaux sociaux, malgré les risques de désinformation, servent aussi à mobiliser pour la paix et à diffuser des messages de tolérance.
Le rôle des institutions et des politiques publiques
La société civile ne peut agir seule. Les États africains, soutenus par l’Union africaine et les organisations régionales, multiplient les initiatives pour promouvoir le vivre-ensemble : commissions vérité et réconciliation, politiques d’éducation à la paix, programmes de désarmement, campagnes de sensibilisation.
Au Sénégal, la tradition du dialogue interreligieux inspire les politiques publiques. En Côte d’Ivoire, la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation a permis d’ouvrir des espaces de parole après la crise post-électorale. En Afrique du Sud, l’héritage de la Commission Vérité et Réconciliation reste un modèle, même si les défis de l’inégalité et du racisme persistent.
Les défis à relever
Malgré ces avancées, les obstacles restent nombreux :
- L’instrumentalisation politique des identités
- La persistance des inégalités économiques et sociales
- La faiblesse de la justice et la culture de l’impunité
- La montée des discours de haine sur les réseaux sociaux
- Le manque de moyens pour les initiatives locales
La prévention des conflits passe par l’éducation, l’accès à l’emploi, la justice, mais aussi par la reconnaissance de la diversité comme une richesse et non une menace.
Vers une culture africaine de la paix ?
La Journée internationale du vivre-ensemble en paix est l’occasion de rappeler que la paix ne se décrète pas, elle se construit. L’Afrique, par sa jeunesse, sa créativité et sa résilience, a les ressources pour inventer de nouveaux modèles de cohésion sociale. Les expériences locales, les innovations sociales et les dialogues interculturels doivent être valorisés, soutenus et diffusés à l’échelle continentale.
Conclusion
Le vivre-ensemble en Afrique est un défi quotidien, mais aussi une promesse d’avenir. En célébrant les initiatives, en identifiant les obstacles et en mobilisant toutes les forces vives, le continent peut devenir un laboratoire mondial de la paix et de la réconciliation. La Journée du 16 mai n’est pas qu’une date symbolique : c’est un appel à l’action, à la vigilance et à l’espérance.